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Optimisme pour le Conseil départemental de la Marne

Finances publiques. Les finances du Département de la Marne vont mieux. À un an d’intervalle, on est passé du pessimisme à une quasi-euphorie que le Président Christian Bruyen, les pieds bien sur terre, a dû refreiner.

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Le Conseil départemental a voté pour le fonctionnement des dépenses en hausse de 2,9 M€ et des recettes en hausse de 20 M€. Gérard Delenclos

Comme chaque année à la même époque, le Conseil départemental rectifie son Budget prévisionnel en fonction des recettes et dépenses nouvelles intervenues en cours de mandat. Cette ultime décision modificative (DM2) précise ainsi ce que sera le budget définitif du Département. Le Conseil a donc voté pour le fonctionnement des dépenses en hausse de 2,9 M€ et des recettes en hausse de 20 M€, pour l’investissement des dépenses en hausse de 10,5 M€ et des recettes en baisse de 21,2 M€. En matière de dépenses de fonctionnement, les hausses les plus remarquables viennent des charges de personnel (+2,3 M€ pour les assistants familiaux), des dépenses sociales (+ 5M€ pour le service d’aide et d’accompagnement à domicile).

En baisse, la bonne surprise vient des allocations RSA, Revenu de Solidarité Active, lesquelles accusent une baisse de 2,9 M€ (-5% d’allocataires). Le RSA représente 102, 8 M€, soit près de 20% des dépenses de fonctionnement de la Marne. La hausse des recettes de fonctionnement est fortement portée par les prévisions de perception des DMTO, Droits de Mutation à Titre Onéreux, qui affichent un supplément de recettes de 10 M€, prouvant la bonne santé persistante des ventes immobilières dans la Marne.

La hausse des dépenses d’investissement est un ajustement de crédits et des lissages de certaines participations du Département. En matière de baisse des recettes d’investissement, pour l’essentiel, il s’agit d’une baisse de 22 M€ du besoin d’emprunt nécessaire à l’équilibre du budget départemental (42 M€ au BP 2021). Le nouveau budget du Département de la Marne (553,5 M€) est supérieur de 4,8% au BP 2021.

Être ou ne pas être sur un nuage ?

On a parlé de nuage durant cette session plénière du Conseil départemental de la Marne. Cela a commencé lors du vote de la DM2, avec la prise de parole de Charles de Courson : « On est sur un nuage. Les DMTO crachent de partout. La TSCA, Taxe Spéciale sur les Conventions d’Assurance, ça crache. Nous ne sommes plus maître de rien. Tout est au plafond. Et demain ? Quel que soit le Gouvernement, il va durcir nos positions. Pourquoi le RSA baisse-t-il ? Attendons ! Mes chers collègues, vivons sur ce nuage dont il faudra descendre l’année prochaine ».

Prudent, le Président Bruyen tempère : « Le fait d’être sur un nuage n’est pas une formule appropriée, disons que nous vivons une accalmie dans la tempête ». Voici peu, Charles de Courson lors d’un vote budgétaire s’exclamait : « Nous sommes à l’os. Nous n’avons plus de marge de manoeuvre. En 2022, le gong va sonner. On ne passera plus. Notre budget sera mis sous tutelle ». Question météorologie, on était vraisemblablement sous le nuage. Un an plus tard, recettes et dépenses comparées, on est au-dessus.

L’aéroport Paris-Vatry confirme ses racines cargo

Avant d’aborder le développement des zones d’activités et notamment les projets des sociétés FTL, ALP Transactions, le Département s’est réjoui des bonnes nouvelles de l’Aéroport Paris-Vatry venant de l’activité cargo qui enregistre 20 454 tonnes au 30 septembre, contre 12 380 tonnes pour l’année 2020. L’expectative reste cependant de mise quant à l’activité passager, animée par le seul opérateur Ryanair sur Porto, Marrakech et Fès, d’un côté un rapport qui énonce : « Des réflexions sont menées quant au modèle actuel et une possible diversification de l’offre en partance de Paris-Vatry », de l’autre cette affirmation du Président Bruyen : « On conserve ce qui existe. Pas de nouvelles lignes en vue ».

« Le fait d’être sur un nuage n’est pas une formule appropriée, disons que nous vivons une accalmie dans la tempête »

Toujours au rang des bonnes nouvelles : la pérennisation de la présence de FTL et l’arrivée de ALP. La société FTL (import-export de marchandises e-commerce avec la Chine), présente depuis 2020 au sein du Terminal cargo n°2, envisage une implantation pérenne sur la ZAC 1 avec l’acquisition de 3 hectares et la construction d’un bâtiment de 12 800 m2 et estime à 50 le nombre de futurs emplois.

De nombreuses sollicitations d’investisseurs

Alp Transactions, distribution de produits agro-alimentaires, vient d’acquérir un terrain de 8 hectares sur la ZAC 2, envisage une extension de 4 hectares, dont un bâtiment de 22 000 m2, et estime à 50 les emplois à suivre. On ne parle pas de saturation du carnet de commandes, à la manière de Charles de Courson : « Il n’y a plus rien à vendre », mais presque : « Les nombreuses sollicitations d’investisseurs, précise le rapport soumis aux conseillers, désirant investir sur les deux ZAC existantes, impliquent qu’aujourd’hui soit engagée une réflexion quant à la création d’une nouvelle zone sur la plateforme ».

Laure Miller, Conseillère départementale et Rapporteur du projet « Atlas des paysages de l’énergie de la Marne ». Gérard Delenclos

En route donc vers une ZAC 3 de 360 hectares, en complément des ZAC 1 (265 ha) et ZAC 2 (157 ha), sans oublier une réserve foncière, propriété du Conseil départemental, de 640 ha. Sur l’actuelle bonne santé de Paris-Vatry, le Président Bruyen tempère les ardeurs : « Plus que la montée de l’activité, il faut se satisfaire de l’équilibre : 1/3 e-commerce, 1/3 cargo et 1/3 pour les marchés de niches. Nous n’attendons pas les restes d’Aéroport de Paris, il nous faut continuer à trouver des marchés nous-mêmes, étape après étape ». Pour mémoire, Paris-Vatry était à l’origine un aéroport 100% fret.

Un atlas des énergies pour les futures implantations

L’aménagement durable du territoire est une compétence du Conseil départemental, même si cette compétence est partagée avec le Conseil régional. La dernière session plénière du Département de la Marne, en lançant son projet d’un « Atlas des paysages de l’énergie de la Marne » reflète bien certains questionnements sur qui fait quoi dans le Grand Est sur ce sujet. Première réponse, figurant dans l’argumentaire et visant particulièrement l’éolien : « L’élaboration de cet Atlas permettra d’interroger la capacité de nos paysages à accueillir le développement de ces énergies et de l’accompagner ». Un outil pour inspirer la planification à un moment où le Département de la Marne se pose la question de la saturation d’installation d’éoliennes sur son seul territoire.

« Le schéma régional n’est pas pleinement satisfaisant. Il nous manque une vision plus locale »

Petite précision : les puissances raccordées en éolienne sur le Grand Est supposent en 2020 : 64% sur le territoire champardennais, 34% en Lorraine et 2% en Alsace. La Marne est le territoire régional qui accueille le plus grand nombre d’éoliennes. Le Président Bruyen dégaine l’argument majeur : « L’attitude positive du Préfet sur ce projet ». L’Atlas sera une co-construction avec l’Etat et avec tous les élus locaux. Les objectifs du projet ? Mieux connaître le territoire marnais, l’accompagner dans ses démarches sur l’évolution des usages de l’énergie, élaborer et tester des outils visant la ressource paysagère et inscrire les infrastructures dans une évolution maîtrisée. Les interventions de certains conseillers sur ce sujet sont édifiantes.

Laure Miller : « le SRADDET est trop généraliste »

Charles de Courson, plus que jamais en verve, met les pieds dans le plat : « Nous sommes dans une situation qui prouve le centralisme de l’Etat. On nous demande de doubler la production éolienne dans la Marne, sans dire un mot sur le pouvoir des élus locaux et intercommunaux ». Le Président Bruyen tempère à nouveau : « Nous allons en discuter avec le Ministère de la Transition écologique et avec le Président du Grand Est ». Alphonse Schwein en rajoute : « 600 éoliennes dans la Marne, cela me paraît suffisant. On nous colle tout dans la Marne et les Ardennes. Trop, c’est trop. On a fait notre part ». Faut-il décrypter ?

C’est à l’Alsace de prendre sa part d’éolien. Conseillère départementale et Rapporteur du projet « Atlas des paysages de l’énergie de la Marne », Laure Miller juge le volet transition énergétique du SRADET, le Schéma Régional d’Aménagement, de Développement Durable et d’Egalité des Territoires, trop régional et ne tenant pas assez compte des spécificités locales : « Le schéma régional n’est pas pleinement satisfaisant. Il nous manque une vision plus locale et de plus, en ce qui nous concerne, nous avons l’impression d’en avoir fait un peu plus que d’autres territoires sur le sujet des implantations d’énergies renouvelables, un sujet qui mérite plus de maîtrise et d’organisation ».

Laure Miller insiste sur le consensus de production d’un document le plus concret et le plus utile possible : « Le document final, élaboré avec tous les acteurs de la filière, sera à l’attention des élus locaux et des associations qui travaillent sur la transition énergétique ou qui s’y intéressent ».