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Le Grand Est construit sa prometteuse vallée de l’hydrogène

Éco-industrie. Depuis 2019, le Grand Est, de son Plan 2020-2030 au consortium Dinamhyse, en passant par des dizaines d’implantations industrielles et l’annonce d’un formidable gisement naturel, tisse la toile d’une véritable structuration de la filière hydrogène, mobilités vertes et process industriels en tête.

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Les Régions Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté, Grand Est et Occitanie ont commandé, en mars 2021, des rames bi-mode alimentées par de l’électricité et de l’hydrogène. Ces trains Régiolis H2 remplaceront, en partie, dans les prochaines années les rames TER diesel. (Crédit : DR.)

Le Plan France Relance du Gouvernement comporte une mesure pour développer la filière hydrogène vert. Le coût de cette mesure est évalué à 7,2 Md€ d’ici à 2030, avec une première phase 2023 financée à hauteur de 3,3 Md€. Cet effort financier vient appuyer le rôle de l’hydrogène dans la transition énergétique. Sa production en masse, notamment par électrolyse, son usage dans les systèmes de piles à combustible ou les moteurs thermiques et sa capacité à être stocké en font un vecteur essentiel de la transition énergétique. Une économie de l’hydrogène émerge en France.

En 2021, le Comité de Direction des Chambres de Commerce et d’Industrie a déployé sur le territoire national un programme de sensibilisation à l’hydrogène. Dans son rapport 2021-2022, l’instance : « Au stade actuel, la situation ressemble à celle de la poule et de l’œuf : les usages sont trop peu nombreux pour que les investissements soient rapidement déployés, tant dans la production de l’hydrogène que dans les équipements d’usage, comme par exemple les véhicules ».

Si son utilisation en tant que vecteur énergétique est récente, l’hydrogène, de par ses propriétés chimiques, a déjà une longue histoire. L’idée d’hydrogène vert remonte à moins de dix ans. L’étude des CCI recense en 2022 quelques 80 écosystèmes hydrogène dont les mises en fonctionnement s’accélèrent.

Les premiers écosystèmes identifiés concernent principalement des flottes captives de collectivités locales, avec des bus, des véhicules utilitaires ou des bennes à ordures ménagères. Le premier déploiement quantitatif appartient à la Région Ile-de-France, avec la flotte de taxis portée par l’entreprise Hysetco. Autre projet remarquable, le Zéro Emission Valley avec le déploiement de 15 électrolyseurs, 20 stations de recharge et 1 200 véhicules, une première représentation de la diffusion de l’hydrogène au service de la mobilité en Auvergne-Rhône-Alpes.

L’hydrogène dans ses applications industrielles

Cinq régions, dont le Grand Est, portaient en 2022 des projets d’usines de production d’hydro- gène en masse par électrolyse pour des usages industriels d’envergure. Dans le Grand Est, le projet Borealis d’usage de l’hydrogène pour la production d’ammoniac.

Quatre régions, dont le Grand Est, accueillent des unités industrielles d’envergure pour produire des électrolyseurs de production d’hydrogène. C’est le cas dans notre région de l’usine John Cockerill d’une capacité de 1 MW/an.

La production d’hydrogène à par- tir de biomasse est plus récente, elle est présente dans le Grand Est avec le projet R-Hynoca, projet de pyrogazéification de biomasse, dans la banlieue de Strasbourg. Pour le stockage en masse, sur des périodes longues, les réserves souterraines offrant des voies de solutions pertinentes, le Grand Est dispose de stockage en cavité saline de Stor’Hy porté par l’entreprise Storengy sur le site d’Etrez. Des réseaux d’hydrogénoducs se déploient, avec dans le Grand Est la conversion de deux canalisations de gaz existantes et connectées à l’Allemagne et au Luxembourg dans le projet MosaHyc.

L’hydrogène pour les mobilités vertes

La production de véhicules hydrogène a démarré avec, par exemple, l’assemblage de véhicules de Renault Master dans la banlieue de Metz. En ce qui concerne les projets d’usages ferroviaires, le Grand Est dispose des trois TER équipés sur la ligne Thann-Mulhouse.

Du côté des fournisseurs spécialisés dans les composants de la chaîne hydrogène (robinetterie, chaudronnerie, tuyauterie ou composants divers), on peut citer dans le Grand Est AKG, en Moselle, pour les échangeurs de chaleur, EFFBE, dans le Bas-Rhin, pour les membranes spéciales, ou Fyves Cryo, dans les Vosges, pour les pompes cryogéniques.

Des avancées concrètes dans le Grand Est

Dans le Grand Est, trois laboratoires de recherche disposent de spécialistes en production d’hydrogène par électrolyse, en stockage et en conception de piles à combustible. Ces laboratoires du CNRS sont situés à Nancy et Strasbourg. Une cinquantaine de chercheurs travaillent sur l’hydrogène dans les universités de Lorraine, de Strasbourg et de Troyes.

Comme pour les activités industrielles et de recherche, des enseignements hydrogène existent dans la plupart des régions. Dans le Grand Est, cet enseignement est porté par le centre international de qualifica- tion et de certificats de composants H2 de l’Institut de Soudure de Saint-Avold et l’IUT de Moselle Est. Autre établissement similaire, L’Université de Lorraine déploie des modules d’enseignement sur le stockage électrochimique et les technologies de l’hydrogène.

Parmi les dizaines de projets en route sur le territoire du Grand Est, et depuis la structuration, dès 2019, de la filière industrielle hydrogène menée par Dinamhyse (six entreprises, deux organismes de recherche, trois pôles de com- pétitivité et une agence de l’inno- vation), le projet John Cockerill a Aspach-Michelbach retient l’attention par son ampleur : un investissement de 100 M€ et 340 emplois potentiels.

Bien des exemples soulignent la véritable fièvre hydrogène du Grand Est, des TER à l’hydrogène dès 2025 aux réalisations sur le terrain comme FaHyence à Sarre- guemines, MHyrabel à Audun-le-Roman ou Hydréol à Chaumont, en passant par le « miracle » de Folschviller : la découverte après dix ans de travaux d’un des plus grands gisements français d’hydrogène naturel qui pourrait bien receler 46 milliards de tonnes, soit la moitié de la production annuelle mondiale. Rendez-vous est donné pour une exploitation industrielle, d’ici à deux ans. Entre Alsace, Meurthe-et-Moselle et Moselle, le Grand Est construit sa vallée de l’hydrogène.