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Le Département de la Marne affiche une capacité de désendettement dans la zone rouge

Budget. Un propos liminaire alarmant, « Nous ne pourrons plus investir », une motion votée à l’unanimité contre le rabotage par l’Etat des recettes. La dernière séance plénière du Conseil départemental de la Marne a reflété un certain désenchantement que n’a pas tempéré l’examen de la décision modificative n°2, porteuse d’explosif pour l’avenir.

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Photo de Jean-Marc Roze au conseil départemental de la Marne
Jean-Marc Roze : « Le Département de la Marne, face aux menaces qui pèsent sur son budget, alerte le Gouvernement, les parlementaires et tous les partenaires de l’action départemental sur l’ampleur de l’effort demandé. » (Crédit : GD)

Avec, dans ce discours, le désormais refrain leitmotiv : toujours plus de dépenses sociales, 75% du budget du Département, avec une augmentation de 17 M€ entre 2023 et 2024, et de moins en moins de compensations de l’Etat. Mais aussi, l’évocation pour la deuxième année consécutive de la fin de l’abondance des DTMO, Droits de Mutation à Titre Onéreux, dont les recettes attendues pour 2025 devraient baisser de 30 M€. Et, au global, un manque annoncé de compensation d’Etat de l’ordre de 90 M€, avec cette conséquence : des investissements reportés et d’autres annulés.

Parce que ces 90 M€ représentent pratiquement la capacité d’investissement de la Marne, la question de pose : demain, les Départements pourront-ils encore investir ? Dans son discours liminaire, le Président Roze aborde à sa manière le sujet : « En 2025, je vous l’annonce avec beaucoup d’émotion, nous allons devoir, pour la première fois, emprunter non plus pour investir mais pour rembourser notre dette. »

Une motion contre le rabotage des recettes

La motion proposée par le Président Roze rejoint son discours introductif. « Le Département de la Marne, face aux menaces qui pèsent sur son budget, alerte le Gouvernement, les parlementaires et tous les partenaires de l’action départemental sur l’ampleur de l’effort demandé ». Un effort de 10,3 M€, pris sur les recettes des Départements et tel qu’il figure dans le Projet de Loi de Finances. La motion vise d’entrée l’ampleur du rabotage. Jean-Marc Roze, au Département, comme Franck Leroy à la Région, n’élude pas une certaine participation, histoire peut-être, comme le dit un certain bon sens populaire, de « Couper la poire en deux ».

La motion du Département reconnait une situation financière dégradée, antérieure à l’annonce du projet gouvernemental de réduction des recettes des collectivités territoriales. Elle rejette cependant en bloc ce projet et fait un certain nombre de demandes. Parmi lesquelles le relèvement provisoire de 1 point du plafond des taux de DMTO, Droits de Mutation à Titre Onéreux, un élargissement de la TSCA, la Taxe sur les Conventions d’Assurances, ou encore l’augmentation jusqu’à 50% de la compensation des dépenses APA, Allocation Personnalisée d’Autonomie, et PCH, Prestation de Compensation du Handicap.

Des moyens pour assumer ses compétences

En bref, le Département veut bien faire un petit effort d’un côté, mais réclame plus de moyens d’un autre. But de la manœuvre : « Redonner aux Départements la capacité à assurer le financement de l’ensemble de leurs compétences ». Des compétences, comme l’action sociale, historiquement attribuée à la seule strate départementale, et d’autres souvent mâtinées de partages avec d’autres collectivités territoriales. Le délice des complexités du millefeuille administratif français, maintes fois critiqué et toujours vivant. Reconsidérer strictement le champ des compétences de chacun, comme source d’économie ? Avant d’évoquer une quelconque faillite, ce que d’ailleurs ne fait pas pour l’instant le Département de la Marne, peut-être faudra-t-il imaginer une énième réforme de la décentralisation un peu plus pragmatique que les précédentes. Dans les faits, ces mises en garde formulées unanimement par l’exécutif marnais, c’est le Budget Primitif 2025 qui dira vraiment quel est l’état des finances du Département de la Marne.

Une Décision Modificative n°2 révélatrice de turbulences

La décision modificative n°2 du budget départemental permet d’adapter les niveaux de vote précédents, budget primitif et décision modificative n°1, eu égard à l’évolution de certaines opérations intervenues au cours de l’année.

Cette DM2 constate + 6M€ en matière de recettes de fonctionnement, celles-ci passant de 519 à
525 M€, avec la belle surprise de 4 M€ supplémentaires émanant des DMTO et portant cette taxe à 74 M€ à fin septembre. En matière de dépenses de fonctionnement, ce sont 24,2 M€ supplémentaires qui viennent s’ajouter au budget de base de 490 M€, la moitié de cette augmentation provenant du service en faveur des handicapés.

Les recettes d’investissement passent de 75 à 93 M€, avec une augmentation de 18 M€ portée par un emprunt de près de 16 M€. Les dépenses d’investissement restent fixées aux 103,8 M€ votés lors du BP 2024. Le compte administratif 2024 anticipé affichent des recettes de 542,7 M€ et des dépenses de 590,1 M€, soit un besoin de financement de 47,4 M€.

Une dette en progression de 17%

Cet exercice d’ajustement des comptes a été l’occasion de révéler certains indicateurs financiers du Département. La dette du Département de la Marne passerait de 156,2 M€ au 1er janvier 2024 à
183,5 M€ à fin 2024, soit une progression de 17%. L’épargne brute, recettes moins dépenses de fonctionnement, s’élèverait à 10,8 M€, une baisse de 150%. Le Département de la Marne n’est, pour l’instant, ni ruiné, ni dans le rouge. Et cependant, des clignotants s’installent. En premier lieu les 17 années de capacité de désendettement, largement au-dessus du niveau d’alerte, entre 12 et 15 ans.

Photo du conseil départemental de la Marne
(Crédit : GD)

Cette séance plénière d’avant budget 2025 a été l’occasion d’aborder une vingtaine des rapports. Parmi les plus significatifs financièrement : 1,3 M€ pour le contrat départemental 204-2027 de prévention et de protection de l’enfance, 0,6 M€ pour des investissements dans les crèches, 2,2 M€ pour l’évolution des dépenses des établissements et services médico-sociaux, ou encore 1,8 M€ pour des projets de création d’équipements.