Le CESER Grand Est annonce une véritable auto-analyse existentielle
Conseil. La dernière séance plénière du CESER, Conseil Economique, Social et Environnemental Régional, a été l’occasion, au travers de l’examen du Budget Supplémentaire 2023 et du Compte Administratif 2022 du Conseil Régional, d’une annonce : le CESER Grand Est présentera d’ici à la fin de l’année, un bilan de demi-mandature sur le thème « Comment nous sommes écoutés et suivis par le Conseil Régional ».
Il peut arriver que le Conseil régional et le Ceser travaillent ensemble sur certains sujets comme le Plan cybersécurité, les enjeux des transitions ou l’égalité Femme/homme dans les politiques publiques. L’extraordinaire, sept ans après la création du Grand Est, mérite bien cette remarque de la Présidente du Ceser, Marie-Claude Briet-Clémont : « Le trimestre qui s’achève a vu s’instaurer des nouvelles pratiques … Nous notons l’amélioration continue de nos relations avec les services du Conseil régional ».
À quoi servirait un Ceser, porte-parole de la société civile organisée, qui ne serait pas informé sur tous les projets du Conseil régional ? Marie-Claude Briet-Clémont enfonce le clou en se demandant à quoi bon des saisines, adressées par la Région au Ceser, qui de la loi ne retiennent pas à la fois les deux missions « Evaluation et prospective » du document commandé :
« J’invite le Conseil régional à utiliser sa seconde assemblée pour contribuer en amont à des évaluations d’impact des politiques qui vont être menées et à inscrire son action dans une dimension prospective que nous sommes en mesures d’accompagner. »
Ne pas oublier les enjeux sociaux des politiques publiques
En plein cœur de la révision du Sraddet, le Schéma Régional de Développement Durable et d’Egalité des Territoires et notamment dans son chapitre transition énergétique, la Présidente du Ceser prévient : « Nous ne pouvons pas imaginer une politique d’adaptation au changement climatique sans, en même temps, prendre en compte les questions économiques, les impacts environnementaux mais aussi les enjeux sociaux. Il ne peut y avoir de politique d’anticipation au changement climatique sans qu’il n’y ait de politique sociale juste et solidaire ».
Autrement dit, pas de justice climatique sans justice sociale et pouvoir d’agir des citoyens. En saluant le travail des diverses commissions du « Ceser hors les murs », c’est-à-dire sur le terrain régional, comme à Bruxelles et dans les régions voisines, la Présidente ne manque pas de rappeler le grand rendez-vous de la rentrée du Grand Est à la Foire de Châlons-en-Champagne, le 7 septembre, avec ce thème décidément à la mode :
« Réussir ensemble les transitions : quels partenariats villes et campagnes ? ». Il y sera question de la coopération plus équilibrée entre ville et campagne, qu’il s’agisse d’énergie, d’alimentation, d’économie, d’environnement, de mobilités, de formation, d’emploi, de relocalisation, d’industrie, d’autonomie ou encore de sobriété.
La difficile équation de l’évaluation
La conférence de presse accompagnant cette séance plénière fut l’occasion de remettre en évidence le casse-tête de l’évaluation des politiques régionales réclamée par le Ceser. A propos de la communication autour du Plan Lycée 4.0, qui connaît certains remous récents de la part d’opposants, Marie-Claude Briet-Clémont lance :
« Peut mieux faire ! Nous ne sommes que consultatifs et quand nous posons des questions sur le sujet, on nous répond qu’il s’agit d’une affaire transversale entre la Région, l’Education Nationale et l’Etat, lesquels se renvoient la balle. En matière d’évaluation, nous avons un bon bout de chemin à faire ensemble ».
Pour rappel, de sources bien différentes, voire contradictoires, le dispositif Lycée 4.0, lancé en janvier 2017, concerne 293 lycées volontaires, bénéficiaires de quelques 115 000 ordinateurs d’une valeur unitaire entre 372 et 452 euros pour les deux modèles de base proposés. Le budget global du dispositif s’élèverait à plus de 50 M€ dans sa version initiale.
Les avis du Ceser Grand Est, sur ce sujet et bien d’autres, sont-ils écoutés par la Région ? Réponse de la Présidente : « Nous aurons, avant le 31 décembre un bilan de demi-mandature qui fera le point sur l’efficacité de nos avis et leur suivi par la Région ». Pour rappel, le mandat 2018-2024 de l’actuel Ceser Grand Est a connu la Présidence de Patrick Tassin, jusqu’en 2021, puis celle actuelle de Marie-Claude Briet-Clémont jusqu’à fin 2024. Cette demi-mandature, placée sous le signe du « Dire au faire », est donc la sienne.
Des avis relativement softs sur le Budget Supplémentaire
Le Compte Administratif 2022, le Budget Supplémentaire 2023 et la feuille de route d’accélération du Grand Est au changement climatique, voilà pour les trois grands dossiers abordés lors de la dernière séance plénière du Ceser, avec des approbations, en général, et des réserves nouvelles ou récurrentes.
Le Ceser prend acte des grandes lignes du Budget Supplémentaire 2023 : 147,5 M€ qui s’ajoutent au 3,9 Md€ du Budget Primitif. Ce BS se décompose en 109,2 M€ de dépenses d’investissement, 27,5 M€ en dépenses de fonctionnement et 10,9 M€ en emprunt prévisionnel complémentaire.
Les avis critiques du Ceser concernent la sous-réalisation du programme de formation, le manque d’information et de concertation sur le projet de regroupements et de fermetures de neuf lycées, projet qui suppose un plan d’investissement de 227 M€. Le Ceser critique l’amalgame sport pour tous et sport professionnel et réclame plus d’aides en faveur du sport amateur et enfin s’interroge sur la destination des 53 M€, en Autorisation de Programme, dans le chapitre développement économique.
Les impatiences explicites provoquées par le Compte Administratif
Les avis du Ceser concernant le Compte Administratif 2022 sont d’une plus grand ampleur. Le CA pouvant être comparé à une évaluation du Budget Prévisionnel, le Ceser ne ménage pas ses observations au travers d’une soixantaine d’avis. On peut citer pour les plus importants et les plus récurrents : les taux d’exécution des deux derniers budgets en baisse (94% en 2021 et 92% en 2022), le manque de clarification des dépenses de fonctionnement, l’absence d’un Plan Pluriannuel d’investissement détaillé, l’exécution insuffisante du budget tourisme, le manque de visibilité de l’affectation des fonds européens, ou encore le manque de clarification concernant la stratégie bioéconomie ou l’organisation des acteurs de l’innovation.
Le Ceser regrette l’absence d’éléments relatifs à l’avancement du Plan 500 relocalisations, demande une présentation financière du soutien à certaines structures touristiques, des explications sur la sous-réalisation des actions de formation, une évaluation du PRIC, le Plan Régional d’Investissement dans les Compétences, des informations concernant la diminution de l’engagement de dépenses pour l’apprentissage.
Cinq avis concernent, d’une façon récurrente, des demandes d’évaluations diverses à propos du dispositif Lycée 4.0 : les aspects techniques, environnementaux et sanitaires, le bilan quantitatif des équipements, des connexions, des usages, de la maintenance … Enfin le Ceser s’interroge sur la sous-utilisation des financements jeunesse, sport et santé et notamment cite la non-consommation de 6,7 M€ concernant le volet « Soutenir le développement des pratiques sportives » et sur l’avancée du niveau de verdissement de l’ensemble de la flotte régionale estimée à 3 200 autocars.
Bref, le Ceser demande et redemande et le Conseil Régional dispose, toute la différence entre une assemblée consultative et une assemblée exécutive. Dans l’attente de ce déjà fameux bilan du Ceser annoncé pour la fin de cette année.