La progression des pertes d’emplois des chefs d’entreprise du Grand Est parmi les plus faibles
Conjoncture. Si certains élus régionaux d’opposition estiment, dans une lecture parcellaire du bilan 2024 de l’Observatoire de la Garantie Sociale des Chefs d’entreprise, la situation des chefs d’entreprise du Grand Est mauvaise, la région s’avère plus résiliente que la moyenne nationale, voire plus performante en affichant la quatrième place des régions les moins touchées par la progression des pertes d’emplois des entrepreneurs.

En France, plus de 60 852 chefs d’entreprise ont perdu leur emploi en 2024, soit 18% de plus qu’en 2023, une évolution cependant en décélération , comparativement au + 33,3% de 2023 et au + 34,1% de 2022. Au cours des quatre dernières années, ces pertes d’emplois ont augmenté de 111%. La situation se dégrade notamment pour les dirigeants des très petites entreprises (TPE) de moins de trois salariés, ces dernières pesant près de 73% du total des pertes au niveau national.
L’évolution annuelle de 2024 varie selon la taille des TPE. L’augmentation concerne les entreprises de 6 à 9 salariés (+30%), les 3 à 5 salariés (+ 21%), les moins de 3 salariés (+ 12%) et les 10 à 19 salariés (+7,5%). Les pertes d’emplois des chefs d’entreprise diminuent de 4,5% pour les unités de 20 à 49 salariés et de près de 20% pour les entreprises de 50 salariés et plus.
Les artisans-commerçants sont les plus sinistrés
Entre 2023 et 2024, les artisans-commerçants, comptabilisant 9,5% de l’ensemble des formes juridiques des entreprises françaises, ont vu le nombre de pertes d’emplois augmenter de 18%, devant les professions libérales (16,6%), les SAS (15,9%), les SNC (11,9%) et les SARL (10,2%). L’augmentation chez les dirigeants d’exploitations agricoles est de 9,3%.
La faiblesse de l’importance de l’activité montre que huit entrepreneurs sur dix, réalisant moins de 0,5 M€ de chiffre d’affaires sont particulièrement fragilisés. Pour eux, le nombre de chômeurs a progressé de 6,4%, alors qu’il a baissé de 6% pour la tranche de 5 à 10 M€ et de 26% au-delà de 10 M€.
L’expérience n’empêche pas le chômage
Ce sont les chefs d’entreprise les plus âgés qui sont les plus exposés à une perte d’emploi. L’Observatoire de l’emploi des entrepreneurs fixe à 46,3 ans l’âge médian des chefs d’entreprise en situation difficile. Dans les six tranches évaluées, de moins de 26 ans à plus de 60 ans, les chefs d’entreprises de 41 à 50ans sont les plus nombreux en exercice (28%), devant les 31 à 40 ans (25%) et les 51 à 60 ans (24%). 14% d’entre eux ont plus de 60 ans. Entre 2023 et 2024, la progression des pertes d’emplois est de + 33% pour les plus de 60 ans, devant les 51 à 60 ans (+18,5%) et les 41 à 50 ans (+17%).
Une position plutôt honorable pour le Grand Est
Dans son bilan 2024, l’association Garantie Sociale des Chefs d’entreprise (GSC) établit un constat par région qui place le Grand Est (6,9% de l’ensemble national) en 7e position pour la part des pertes d’emplois des chefs d’entreprise, mais surtout en 3e position pour la moindre dégradation de la situation entre 2023 et 2024.
Sur ce dernier critère conjoncturel, les pertes d’emploi des entrepreneurs du Grand Est n’augmentent que de 13,3%, derrière le Centre-Val de Loire (+9,8%) et l’Occitanie (+11,7%) et devant les Hauts-de-France (+14,5% et la Bourgogne-Franche-Comté (+14,6%).
Au niveau national, deux secteurs sont particulièrement sinistrés entre 2023 et 2024 : les transports et la logistique (+29%) et la construction (+24%). À l’inverse et cas unique, les pertes d’emplois de l’industrie reculent de 0,2%. Par activité, les pertes d’emplois progressent surtout dans la sécurité (+113%) et le transport routier de voyageurs (+36%). Elles régressent dans les services de réparation d’ordinateurs et de biens personnels (-70%) et dans le nettoyage de bâtiments (-32%).
Une meilleure conjoncture pour l’Aube et la Marne
Le nombre de pertes d’emplois chez les chefs d’entreprise en 2024 dans le Grand Est est surtout sensible dans le Bas-Rhin (931), la Moselle (679), le Haut-Rhin (659) et la Marne (415) et moins sensible en Haute-Marne (105) et dans la Meuse (161). Huit des dix départements du Grand Est, région en hausse globale de 13,3%, subissent une dégradation conjoncturelle, notamment la Meuse (+61%), Meurthe-et-Moselle (+ 34%) et le Haut-Rhin (+28%). A l’inverse, l’Aube (-4,8%) et la Marne (-3,3%) enregistrent des baisses d’emplois perdus par les chefs d’entreprise. Sur le territoire champardennais, la Haute-Marne (+11,7%) et les Ardennes (+1,1%) sont en dégradation conjoncturelle. Par secteur d’activité dans l’ensemble du Grand Est, la conjoncture est surtout mauvaise pour le transport et la logistique (+ 54%), pour la construction (+40%) et l’agriculture (+29%). Elle est plutôt favorable pour l’industrie (-8%), l’hébergement, la restauration et les débits de boissons (-5%).
« Une croissance faible qui fragilise les entreprises »
Pour le Président de l’Association GSC, « cette situation s’inscrit dans un contexte économique particulièrement tendu, avec une inflation certes contenue mais une faible croissance qui fragilise les entreprises. Souvent confrontés à des difficultés de rentabilité, les entrepreneurs peinent à maintenir leur activité ». En conclusion du bilan 2024 de l’Observatoire de l’emploi des entrepreneurs, Hervé Kermarrec estime un début d’année 2025 crucial pour beaucoup d’entrepreneurs : « Les mesures fiscales votées, l’instabilité politique et les tensions internationales plongent les chefs d’entreprise dans un climat de forte incertitude ».