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La CMA lance l’opération « Artisane de mon territoire »

Artisanat. La Chambre des Métiers et de l’Artisanat du Grand Est lance l’opération « Artisane de mon territoire », une promotion de 10 femmes artisanes, ambassadrices de l’entrepreneuriat au féminin.

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Photo de Virginie Guérin, Anne-Marie Devavry, Christian Kudla, Laura Pillon et Juliette Leenhardt
De gauche à droite : Virginie Guérin, Déléguée départementale aux Droits des femmes ; Anne-Marie Devavry, juge aux Prud’hommes de Reims ; Christian Kudla, juge au Tribunal de commerce de Châlons-en-Champagne ; Laura Pillon, conductrice VTC ; Juliette Leenhardt, artisane peintre en décor.

Il y a quelques années, le mot « artisane » n’était pas employé. Or, en 2024, un artisan sur quatre est une femme et une création d’entreprise sur trois dans le secteur de l’artisanat est réalisée par une femme. C’est dire si, non seulement elles sont de plus en plus présentes dans les métiers, mais également à la tête de leur propre structure.

« L’artisanat est un pilier essentiel de l’économie, il contribue à la vitalité de nos territoires, à la qualité des services de proximité et à la transmission de notre patrimoine. Et parmi les artisans, les femmes jouent un rôle de plus en plus important. Elles sont à la tête d’entreprises florissantes qui créent des emplois et contribuent à la dynamique du territoire », souligne Dominique Hautem, président de l’établissement Marne de la CMA Grand Est. « Au sein de la CMA de la Marne, nous accompagnons en effet 48% de créatrices, faisant du département le plus féminisé du Grand Est en termes de créations d’entreprises dans le domaine de l’artisanat », relève Céline Delacroix, Directrice territoriale.

C’est pourquoi la CMA Grand Est a décidé de lancer le réseau Artisane de mon territoire [1] , ayant pour objectif d’accompagner les femmes artisanes dans leur parcours entrepreneurial et les encourager à s’engager dans la vie publique et au sein des instances professionnelles.

Oser s’investir

Car si elles franchissent le pas de créer leur activité, en revanche, la plupart ne prennent pas l’initiative d’aller siéger au sein d’organismes représentatifs. Pour Virginie Guérin, Déléguée départementale aux Droits des femmes au sein de la Direction départementale de l’emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations de la Marne, la raison réside dans « la sociologie ».

« Les femmes ont tendance à s’autocensurer et à obéir à des stéréotypes de genre, ces derniers étant renforcés par l’attitude de divers organismes dans le montage d’un projet. Exemple avec l’octroi d’un prêt bancaire plus compliqué à obtenir lorsque l’on est une femme entrepreneure qu’un homme », souligne-t-elle. « L’État a mis en place des solutions comme la Garantie ÉGALITÉ Femmes de France Active qui garantit le prêt accordé par la banque jusqu’à 80% pour des montants allant jusqu’à 50 000 €. »

Pour que les femmes découvrent les instances professionnelles (syndicat, tribunaux de commerce, Prud’hommes, chambre des métiers, etc.) il faut qu’elles en aient connaissance. Et c’est tout le but « d’Artisane de mon territoire » : apporter des formations et proposer la découverte des lieux de décisions économique et social du département. Christian Kudla, juge au Tribunal de Commerce de Châlons-en-Champagne est ainsi venu expliquer son activité et dire l’intérêt de s’engager au sein de la juridiction. « À Châlons, sur douze juges au Tribunal de Commerce, seules trois sont des femmes. Nous aimerions plus de mixité mais nous avons du mal à recruter. Être juge au Tribunal de Commerce, c’est agrandir son réseau, découvrir et renforcer de nouvelles connaissances pour les transmettre aux autres », explique-t-il. Alors pour démystifier le poste, Christian Kudla rappelle que le juge bénéficie d’une formation de 8 jours à l’ENM et qu’il statue sur un à trois jugements par mois.

« Bien sûr, au début, on met du temps à rédiger un jugement mais avec l’expérience, ça devient plus automatique. » Seul prérequis, être à son compte depuis au moins cinq ans et avoir plus de 30 ans.

Pour les Prud’hommes, la parité est obligatoire, il y a donc autant de conseillers femmes que hommes. « Il y a 20 ans, on militait déjà pour féminiser les métiers », se souvient Anne-Marie Devavry, conseiller aux Prud’hommes de Reims et ancienne cheffe d’entreprise dans le bâtiment. « Nous appliquons strictement les textes et nous essayons de trouver des accords en conciliation, ce qui représente 15% des affaires actuellement. Le droit du travail évolue. Il y a 15 ans, 85% des jugements étaient favorables aux salariés, aujourd’hui c’est 63%. Les employeurs aussi, ont des droits », souligne-t-elle.

Se positionner comme cheffe d’entreprise n’est pas toujours évident, aussi bien dans le regard des salariés que des clients. Juliette Leenhardt, artisane peintre en décor a mis du temps à passer « de la position d’artiste à celle de cheffe d’entreprise ». « Il y a toujours la question de la légitimité professionnelle, de l’attente dans le regard des autres. Parfois, il faut forcer sa nature et prendre une posture plus rigide et autoritaire pour s’affirmer. Ça prend du temps », confie celle qui a trouvé beaucoup d’aide auprès de la CMA, notamment en ce qui concerne la formation au numérique. « Nous proposons un panel de services et de formations dans l’accompagnement non seulement à la formation mais aussi au long cours, dans la progression de l’entreprise », souligne Dominique Hautem.

[1Les candidatures pour devenir ambassadrices de l’entrepreneuriat au féminin sont ouvertes jusqu’au 18 août, avec un premier rendez-vous, le mardi 3 septembre, sur la Foire de Châlons.