L’actualité des finances de l’état en filigrane du statut de l’élu local au 72e Congrès des Maires de la Marne
Collectivités. Le sujet du 72e Congrès des Maires et Présidents d’intercommunalités de la Marne était bien « élu local, quel défi ! ». Les projets gouvernementaux de ponction sur les recettes des collectivités territoriales sont venus perturber le thème central.
Que retenir de la table ronde sur le thème « élu local quel défi ! » qui réunissait Romain Bonhomme, maire de Beine-Nauroy, Pascale Chevallot, maire de Gigny Bussy, Murielle Fabre, Secrétaire Générale de l’Association des Maires de France et maire de Lampertheim dans le Bas-Rhin, Franck Leroy, en sa qualité de Président des Maires et Présidents d’Intercommunalités de la Marne et Catherine Vautrin, Ministre du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation ?
Parmi les prises de parole, à noter ces points de vue sur le sujet : « Des maires qui font tout, cela prend du temps… Entre 50 et 70 heures par semaine, entre commune et intercommunalité… Des réunions souvent le soir… Une fonction à plein temps qui demande un minimum de 32 heures par semaine … Un équilibre difficile entre vie d’élu et vie professionnelle… Des élus qui prennent des risques… La solitudes des maires de petites communes… Une action publique qui implique une certaine technicité et donc une formation… Des carrière stoppées à cause du mandat… Des agressions désinhibées contre les élus… 39% des maires insultés sur les réseaux sociaux… Le besoin de plus de vidéoprotection dans les communes… Y aura-t-il suffisamment de candidats en 2026 ?… 55% des maires qui déclarent ne pas vouloir se représenter… 40 démissions de maires, chaque mois en France… ». Et la conclusion de cette table ronde revenant à Murielle Fabre : « Il faut que vous soyez heureux d’exercer au quotidien votre mandat de maire, parce que vous êtes les visages de la République ».
Franck Leroy : « Oui à la solidarité, non à la disproportion »
Plus qu’un rapport moral traditionnel, Franck Leroy évoque l’actualité d’un Projet de Loi de Finances qui perturbe les élus locaux. « Le climat entre les élus de notre pays et le gouvernement s’est tendu. D’abord parce qu’une note de Bercy a ouvertement mis en cause la responsabilité des collectivités publiques dans la situation des finances de l’Etat… Une profonde injustice… Les collectivités territoriales ne sont pas responsables du déficit public national. La part des collectivité dans la dette publique n’est que de 8,9%. Elle est en baisse, depuis 30 ans quand celle de l’Etat a été quasiment multiplié par trois dans la même période. La dette des collectivités est une dette d’investissement. Elle porte 70% de l’investissement civil public ».
S’il juge ces accusations offensantes, Franck Leroy apporte cette précision : « Ce n’est pas le principe d’un soutien au redressement des finances de l’Etat qui est contesté, c’est le caractère disproportionné et donc insupportable de l’effort demandé. Nous sommes aussi fondés à demander à l’Etat de s’engager durablement dans une démarche de retour à l’équilibre ».
« Il est temps de simplifier la décentralisation »
« Il est temps, un peu plus de 40 ans après les lois de décentralisation, de passer à une autre relation entre l’Etat et les communes … Nous avons besoin de construire une relation avec l’Etat, qui soit, définitivement, une relation de confiance et non plus une relation marquée par la méfiance voire par la défiance ». Par ailleurs, le Président des Maires et Présidents d’Intercommunalités de la Marne critique la complexité et l’abus des normes encombrant l’action des élus locaux. S’adressant à la Ministre et ex-Présidente du Grand Reims : « Nous attendons de vous que vous définissiez votre conception de ce fameux partenariat avec les territoires ».
La décentralisation selon Franck Leroy : « Nous avons besoin de simplifier la décentralisation, nous avons besoin d’y voir plus clair sur les responsabilités de chaque niveau d’administration territoriale, nous avons besoin de retrouver une véritable autonomie fiscale, nous avons besoin de connaître les missions que l’Etat attend de nous et d’avoir l’assurance que nous aurons les moyens de les assumer dans le temps ». En conclusion, en évoquant les 566 192 élus locaux du pays, le Président Franck Leroy déclare : « En protégeant nos élus, c’est la démocratie que nous préservons ».
Le discours cash de Catherine Vautrin
La Ministre du Partenariat avec les Territoires et de la Décentralisation joue à domicile : « On se connaît bien et donc je vais parler cash ». Jamais elle ne dira que les maires sont responsables du déficit budgétaire de la Nation, au passage deuxième budget de l’Etat, derrière celui de l’Education Nationale. Il faut donc arrêter l’augmentation de la dépense publique qui pèse 57% de la richesse nationale contre 49% en moyenne européenne et nous ne faisons pas mieux qu’ailleurs.
Le sujet, rappelle Catherine Vautrin, est une économie de l’Etat à hauteur de 20 Mds €, 15 Mds € sur la partie sociale et 5 Mds € auprès des collectivités. Sujet qui passe par plusieurs réflexions en matière d’économie envisageable au niveau des collectivités locales : l’organisation de la fonction publique territoriale, le fonds de compensation de la TVA et sa rétroactivité, le gel de la TVA et cette promesse : « Pas de baisse des dotations ».
Mais, la Ministre n’entend pas se contenter de parler du budget 2025. D’autres dossiers la préoccupent. Et c’est le statut de l’élu local qu’elle évoque avec une inscription du projet de loi à l’Assemblée Nationale en janvier prochain. Une révision nécessaire face à des signaux faibles : 6,8% des 36 000 maires qui ont démissionné depuis le début de leur mandat et plus de 57 000 sièges de conseillers municipaux vacants, soit 11% des élus locaux de la France. « Être Maire, c’est avoir la passion de l’action publique. Il faut protéger les maires », affirme Catherine Vautrin.
La déconcentration, priorité et urgence
Evoquant la libre administration des communes, une vieille promesse des premiers textes de la décentralisation de 1982, la Ministre calme les attentes de l’auditoire : « Je ne vais pas m’engager dans un nouveau grand soir de la décentralisation, mais ce qui m’intéresse c’est l’engagement sur mesure au quotidien pour avoir la capacité à réellement vivre ce rôle de partenariat. La première chose concrète que l’on puisse faire c’est de la déconcentration : le travail d’écoute des représentants de l’Etat, vis-à-vis des projets de territoires, régler vite et mieux les sujets du quotidien. Déconcentrer, c’est faire du concret de proximité. Une action conjuguée des élus et des représentants de l’Etat. Supprimer les normes génératrices de coûts et de complexités ». Bref, faire preuve de bon sens.
Et lorsque la Ministre évoque la nécessité de faire le ménage dans la masse des plans, des structures et des normes en tout genre, c’est un tonnerre d’applaudissements d’une salle comble qui approuve. Ce ménage, elle ne le fera pas seule et le dit en toute humilité : « Je n’ai pas le monopole de la simplification et sur ce sujet, je suis à la disposition de l’Association des Maires de France, pour ouvrir avec vous le chapitre de l’expérience, celle de la proximité et de l’écoute ». Et Catherine Vautrin conclut : « Que les maires se sentent écoutés, ni asphyxiés, ni bafoués, c’est le sens de mon engagement dans ce gouvernement et auprès de vous ».
130 maires de l’Aube vent debout contre la loi de finances 2025
« Avec la loi de finances, l’État prend le risque de proposer des mesures récessives. Nous ne pouvons accepter qu’on nous fasse les poches avec la mise en place d’un fonds de prévention qui va siphonner les recettes de fonctionnement en amont des communes et des intercommunalités, ça n’est pas acceptable. C’est une remise en cause de la parole de l’État ». 130 maires ont répondu à l’appel de François Baroin, président départemental de l’association des maires de France en préambule au Congrès des Maires de France. Un rassemblement pour s’insurger contre la loi de finances 2025 et la dégradation des comptes publics et la volonté de l’État de ponctionner les budgets des collectivités. « Nous représentons 70 % de l’investissement public » rappelle François Baroin qui invite l’État à mettre de l’ordre dans ses propres comptes pour éviter de freiner la croissance et l’emploi que portent les collectivités. Les 130 maires rassemblés devant la mairie témoignent de leur inquiétude et d’une position partagée.