« Il faut que l’on retrouve des marges de manoeuvre »
Budget. Les conseillers départementaux ardennais se sont réunis pour l’examen et l’adoption du compte administratif 2024 permettant le vote du Budget 2025.

C’est la première décision modificative du budget de l’année survenue depuis l’adoption du projet de loi de Finances, mettant fin à plusieurs semaines d’incertitudes pour les collectivités locales. Mais malheureusement, selon Noël Bourgeois « elle n’apporte rien aux Départements en matière de recettes nouvelles, bien au contraire »... « C’est une contribution au redressement des finances de l’Etat qui nous est demandée et d’autres dispositions viendront, en 2025, de nouveau alourdir nos dépenses ou nous priver de recettes supplémentaires », appuie-t-il. Ceci car les dotations de l’Etat devraient être stables en 2025 alors que les Départements devront « faire face à des charges supplémentaires tout en veillant à préserver un service public de qualité ». Notons toutefois que les Ardennes, après avoir bataillé fermement, ont perçu en 2024 un apport de 5,1 M€ du Fonds de sauvegarde. Ce qui est loin de compenser les dépenses supplémentaires liées à la prise en charge des enfants confiés au titre de l’aide sociale ainsi que les mesures et prestations aux personnes âgées et en situation de handicap dont les crédits inscrits s’élèvent respectivement à 1,9 M€ et 7,75 M€.
« Face à ces charges nouvelles, l’Etat nous donne généreusement la possibilité d’augmenter pendant 3 ans le plafond des droits de mutation de 0,5 point maximum. Un geste qui ne lui coûte rien et ne permettra pas à notre collectivité, loin s’en faut, d’absorber les dépenses nouvelles qui nous sont imposées sans négociation et, bien évidemment, sans compensation », insiste Noël Bourgeois.
Faire des choix et des sacrifices
Et le Président du conseil départemental de compléter ainsi le tableau : « la mobilisation toujours plus grande de nos ressources par des décisions unilatérales de l’Etat va nous obliger très rapidement à faire des choix, des sacrifices et ça nous ne pouvons l’accepter. Nous sommes arrivés au bout d’un système sur le financement des collectivités départementales. Devrons-nous sacrifier l’aide sociale aux plus démunis, abandonner nos communes en réduisant notamment l’ingénierie départementale, laisser nos routes se dégrader, renoncer à accompagner les enfants de l’Aide Sociale à l’Enfance, stopper notre plan ambition collège, abandonner nos projets structurants sur nos bases de loisirs, sur la Maison départementale des sports, laisser nos bâtiments à l’abandon ? »
Il en appelle donc plus que jamais à la représentation nationale pour qu’une véritable péréquation verticale soit mise en place à partir de critères objectifs de pauvreté afin de soutenir les plus fragiles. « C’est à ce prix que des Départements comme le nôtre pourront à nouveau retrouver des marges de manoeuvre et éviter de faire des choix, au détriment de nos concitoyens et de notre patrimoine ».
Dans ce contexte, le CD 08 a dégagé un excédent disponible de 24,3 M€ en résultat de clôture de l’exercice 2024. « Ce qui peut paraître une somme conséquente est en réalité en nette baisse par rapport à 2023 car nous avons perdu 9 M€ en un an. Tous les dispositifs engagés unilatéralement par l’Etat et sans aucune concertation nous ont coûté 19,6 M€ supplémentaires, seulement compensés par moins de deux millions d’euros. On peut mesurer l’impact important de ces décisions ». Le Département a toutefois décidé de continuer d’investir dans des opérations liées au tourisme, à l’extension de la maison des sports de Bazeilles et au plan collèges. Mais 2025 amène la collectivité à tendre le dos en raison des charges nouvelles déjà dévoilées et qui alourdiront encore ses comptes. Avec, depuis le 1er janvier, une hausse de 3 points du taux de cotisation employeur à la CNRACL (Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales), ou encore la revalorisation, le 1er avril, de 1,7 % du RSA, soit une charge supplémentaire de 1 M€ pour la collectivité. Le gel de la TVA va, par ailleurs, priver le Département de sa principale dynamique de ressources (moins 3 millions d’euros). Des recettes qui seront aussi diminuées par la baisse des DMTO (Droits de mutation à titres onéreux). Tout cela alors que rien n’indique que le Fonds de sauvegarde sera reconduit en 2025.
En raison de ces contraintes supplémentaires, la colère gronde au sein des assemblées départementales. « Nous sommes arrivés au bout d’un système sur le financement de nos collectivités. Il y a urgence. » Lors d’un récent séminaire tenu à Beauvais, la majorité des Départements ont menacé de ne plus financer toutes les charges nouvelles non compensées. « Cette fronde qui commence à monter va peut-être commencer à faire réfléchir l’État », espère le président de l’entité ardennaise, inquiet aussi du déficit colossal de l’Etat.