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Berges de Marne, le projet d’une vi(ll)e

Urbanisme. La Ville d’Epernay a engagé un vaste programme de réhabilitation des anciens ateliers SNCF pour les transformer en un Eco Quartier au cours de la prochaine décennie.

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  • Photo du quartier des Berges de Marne
    (Crédit : BB)
  • Les démolitions sont en cours sur le site
    Les démolitions sont en cours sur le site où seuls quatre bâtiments d’une surface totale de 15 000 m2 sont conservés. (Crédit : AT)

Les résultats des premières déconstructions sur site sont déjà spectaculaires. Depuis le pont qui surplombe les voies ferrées, l’on peut apercevoir une partie des 12 hectares des anciens ateliers SNCF d’Epernay, auparavant masqués par des nombreux bâtiments. Certains d’entre eux ayant été démolis pour faire place nette, le formidable potentiel foncier du site fermé au public, saute aujourd’hui aux yeux des passants. C’est ici que va se construire dès les prochains mois, mais surtout au cours de la prochaine décennie, le Quartier des Berges de Marne, qui va relier le centre-ville historique à la rivière qui traverse Epernay de part en part.

Ce site, occupé depuis 1848 par les ateliers de chemins de fer, est un lieu emblématique du patrimoine ferroviaire local. Les deux rotondes installées ici au milieu du XIXe siècle ont laissé place à de nombreux bâtiments où, au fil des décennies, ont été réalisés l’entretien et la réparation du matériel roulant de la SNCF. Un site tombé en désuétude depuis une vingtaine d’années. En décembre 2020, l’Etablissement Public Foncier du Grand Est (EPFGE) a acquis par voie amiable un peu plus de 10 hectares appartenant à la SNCF. De quoi pouvoir conduire, en tant que maître d’ouvrage, aux côtés de la Ville d’Epernay, les études et les travaux de pré-aménagement.

Un site labellisé Eco Quartier

Le nouveau quartier, baptisé Berges de Marne s’étalera sur la douzaine d’hectares occupés jusqu’alors par les ateliers SNCF mais son impact sera bien plus vaste, puisque les emprises qui le jouxtent seront elles aussi amenées à être réaménagées plus ou moins directement. Au total, ce sont près de 18 hectares qui seront concernés par ce projet, un quartier qui réunira des logements, des commerces et services, des équipements publics, des bureaux, un parking en silo, autour de parcs urbains. Pour Joachim Verdier, adjoint au maire en charge notamment de l’urbanisme, « c’est un projet de long terme qui va prendre plusieurs années à se dessiner, une décennie au minimum ». Un projet labellisé EcoQuartier par les Ministères de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales et de la Transition écologique et solidaire. Un label qui valorise les projets d’aménagement prenant en compte les enjeux et principes du développement durable.

C’est justement l’intention de la Ville qui, à travers la charte de labellisation, s’engage à mettre en œuvre les 20 chapitres du référentiel ÉcoQuartier. Ceux-ci concernent tant la valorisation du « patrimoine naturel et bâti, l’histoire et l’identité du site », que la contribution « à un développement économique local, durable, équilibré, social et solidaire », ou à « un urbanisme permettant d’anticiper et de s’adapter au changement climatique et aux risques ». « Le projet préservera la valeur patrimoniale du site et le caractère historique et les constructions industrielles dont la qualité est reconnue », explique Joachim Verdier. En effet, le projet vise à garder intacte la mémoire des anciens Ateliers SNCF, en conservant quatre bâtiments emblématiques sur une surface de 15 000 m2.

Une passerelle pour commencer

Si l’année 2023 a été essentiellement consacrée aux déconstructions des bâtiments non conservés, l’année 2024 sera consacrée à la dépollution du site. Cette année verra surtout le début des travaux de la passerelle, qui reliera le centre-ville au futur quartier, en enjambant les voies SNCF. Cette passerelle sera réservée aux mobilités douces (piétons et cycles). « Les travaux commenceront en avril 2024 », souligne Géraldine Perrodin, responsable du service développement urbain de la Ville d’Epernay. « Les premières interventions à proximité du faisceau ferroviaire ne seront engagées qu’à partir de septembre, après les Jeux Olympiques. »

En effet, certains travaux nécessitant d’interrompre momentanément la circulation des trains, une concertation a été engagée de longue date avec la SNCF pour ne pas pénaliser le transport de voyageurs. Ce sont donc essentiellement des travaux de nuit qui seront réalisés, avec une organisation particulière, notamment pour ne pas mobiliser les trois voies à la fois. La passerelle devrait être terminée pour la fin du mois de juillet 2025. D’un montant de 15 millions d’euros, l’ouvrage sera d’ailleurs subventionné à hauteur de 80% par les différents fonds et collectivités, dans le cadre de la promotion des mobilités douces.

Sobriété foncière

Le quartier des Berges de Marne s’étendra sur près de 18 hectares au total, ce qui correspond à une superficie équivalente à celle du centre-ville historique d’Epernay. Un enjeu fort pour la ville qui, de par son implantation géographique et son encerclement par les coteaux viticoles, voit son extension relativement contrainte. Dans ce cadre, la possibilité de pouvoir construire entre 400 et 500 logements, assortis de commerces de proximité et de services dans le prolongement du centre-ville historique, relève d’une opportunité que la ville ne pouvait que se saisir. D’autant plus avec les objectifs Zéro Artificialisation Nette (ZAN) des sols portés par l’Etat dans le cadre de la loi Climat et résilience adoptée en août 2021 et qui prévoient l’encouragement de la réhabilitation de friches pour la création de nouveaux projets de construction et d’aménagement.

« L’idée c’est de réaliser un projet conforme à nos objectifs de sobriété foncière, tout en contrant une déprise démographique et en redonnant une dynamique nouvelle au territoire », souligne l’adjoint au maire. Si aucun projet n’est défini à ce jour, la collectivité est, par exemple, en discussion avec l’hypermarché Carrefour, situé en bordure de site, pour imaginer dans quelle mesure l’enseigne pourra être intégrée au projet. Une emprise réservée à un hypermarché est d’ailleurs indiquée sur le plan de travail de la Ville, le long des voies ferrées. Plusieurs bâtiments ont également fait l’objet d’un accord à l’amiable avec leurs propriétaires pour procéder à leur démolition, comme certains immeubles qui céderont leur place à un aménagement de la circulation pour l’entrée dans le futur quartier.

Appel à projets

Depuis plusieurs mois, la collectivité a déjà réalisé des premières études de faisabilité technique et financière, notamment sur les bâtiments qui ont été conservés en accord avec les Architectes des Bâtiments de France. « Nous avons déjà poussé certaines études de faisabilité en matière d’hôtellerie et de bureaux pour ces bâtiments qui ont été construit dans les années 40 et qui peuvent se révéler exigeants par leur structure architecturale », précise Géraldine Perrodin. Les logements en revanche feront assez logiquement l’objet de constructions neuves en raison des normes techniques, énergétiques et environnementales qui s’imposent à eux. « Nous allons déposer un dossier de création de ZAC (zone d’aménagement concerté) en mai prochain. La concertation publique a déjà eu lieu et nous devrions choisir l’aménageur mi-2025 ».

Pour Joachim Verdier, la Ville n’envisage pas forcément réaliser de nouveaux équipements publics dont elle est déjà bien dotée, mais elle mise sur l’apport de partenaires privés en recherche de foncier sur le territoire. « Dans le cadre de cet aménagement global nous comptons nous appuyer sur des partenaires et des porteurs de projets susceptibles de nous apporter des idées nouvelles et aussi des compléments d’activité économiques sur le bassin sparnacien ».