À Châlons, l’activité du Tribunal administratif bondit de plus de 30 %
Justice. Le Tribunal administratif de Châlons a effectué sa rentrée judiciaire, sur fond d’augmentation des dossiers avec des effectifs pourtant constants. Un point d’attention particulier souligné par la présidente du Tribunal, Sylvie Mégret.

Avant de commencer un point sur l’activité du Tribunal administratif de Châlons, sa présidente, Sylvie Mégret, a tenu à rappeler, en écho à l’actualité judiciaire, que « ce n’est pas le juge qui condamne mais la loi » dans un contexte où « la justice et ses représentants font l’objet de critiques et d’attaques ».
L’interprétation de la loi et la sanction associée étant tout de même de la prérogative du juge… Mais là n’était pas le sujet principal. L’audience était surtout l’occasion pour le tribunal de rendre compte de son activité, et celle-ci a fortement augmenté en 2024-2025. « Cette année, le taux de progression est vertigineux par rapport aux précédentes années. Nous sommes passés d’un taux moyen de progression d’environ 12% entre 2018 et 2024 à plus de 30% en septembre 2025 », indique Sylvie Mégret. En 2024, le tribunal avait franchi pour la première fois de son histoire la barre des plus de 3 000 entrées par an pour atteindre + 9,6%. « Fin 2025, nous devrions atteindre, si le taux de progression reste constant 4 250 entrées voire un peu plus, faisant du Tribunal administratif de Châlons, l’un des six au niveau national, connaissant la plus forte croissance, surtout en référés. »
Ces entrées se répartissent géographiquement pour plus de 52 % des requêtes enregistrées pour le département de la Marne, 25% environ pour l’Aube, 13% pour les Ardennes, et un peu plus de 9 % pour le département de la Haute-Marne.
De multiples facteurs
Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette hausse. D’abord, cela tient à la nature des contentieux. « On observe une augmentation dans le domaine des libertés publiques et des affaires concernant la détention. Il faut rappeler que notre ressort compte cinq maisons d’arrêt et centres de détention, ce qui génère naturellement plus de recours », explique la présidente du Tribunal administratif. Ensuite, Sylvie Mégret a « le sentiment que la justice administrative a été davantage découverte après la période du Covid. Beaucoup ont pris conscience qu’il était possible de contester un certain nombre d’actes des personnes publiques devant le tribunal administratif. Par ailleurs, les réorganisations successives de l’État ont pu fragiliser certaines administrations, dont le fonctionnement est parfois moins fluide, ce qui conduit aussi à davantage de litiges. »
Enfin, comme dans la plupart des tribunaux, le contentieux des étrangers augmente à nouveau. « Après une baisse liée à la mise en oeuvre de la loi immigration, nous retrouvons un taux d’environ 40 % du total des affaires, ce qui reste considérable. Cela montre bien que, globalement, toutes les matières progressent. Le seul domaine qui ne croît pas actuellement, c’est celui des marchés publics et des contrats. »
Concernant les référés, en 2023, le tribunal avait traité 269 référés. En 2024, il avait connu une progression de près de 50% et avait atteint 395 dossiers. La progression a continué pour atteindre, en septembre 2025, 432 référés… « Le taux de progression depuis deux ans est d’environ 50% chaque année, ce qui est considérable. » Une augmentation qui préoccupe la présidente du tribunal. « Jusqu’à quand va-t-on pouvoir y parvenir sereinement ? », s’interroge-t-elle alors que le tribunal administratif parvient, pour l’instant, à contenir son stock de dossiers de plus de deux ans qui n’est aujourd’hui que de 3,4% soit bien en dessous du taux moyen de 11% des TA de même catégorie.
Flux tendu
Face à toutes ces augmentations, le Tribunal administratif a pourtant perdu un poste en surnombre en 2025. « J’essaie de le récupérer, mais rien ne garantit que j’y parviendrai. Avec les contraintes budgétaires actuelles, il n’est pas prévu d’augmentation des effectifs de magistrats. Pourtant, la situation devient préoccupante : le phénomène est national, y compris au Conseil d’État, où les chiffres explosent. Il faudra bien trouver une solution, car le stock de dossiers va croître et les délais de jugement vont nécessairement s’allonger. »