Collectivités

10 000 emplois : l’Aube au cœur du réacteur

Énergie. Candidats à la construction de deux nouveaux EPR2 dès 2035, le CNPE de Nogent, l’Aube et la Région préparent les besoins en recrutement de milliers d’hommes et des femmes pour le chantier du siècle et des générations futures.

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  • Photo des deux réacteurs de la centrale de Nogent-sur-Seine
    Les deux réacteurs de la centrale de Nogent-sur-Seine ont respectivement été mis en service en 1988 et 1989. Ils produisent en moyenne 14 TWh par an. (Crédit : DR)
  • Photo de la présentation de la candidature aux acteurs de l'emploi et de la formation
    La présentation de la candidature aux acteurs de l’emploi et de la formation pour relancer le nucléaire. (Crédit : MBP)

Se mettre en ordre de marche pour être prêt en 2035. La relance de la filière nucléaire s’organise dès aujourd’hui. La centrale de Nogent-sur-Seine monte en puissance sur la formation et les ressources humaines pour anticiper le marché de construction de deux nouveaux réacteurs EPR2 pour lesquels elle candidate. « C’est de très loin l’enjeu le plus important pour les 30 prochaines années. Le temps de la décision, deux ans, le temps de la mise en place du cadre général, le temps du chantier, 10 ans de travaux, 10 000 emplois, 10 milliards d’euros d’investissements et le temps de l’ouverture… on est en 2040. Nous sommes bien dans la projection, dans le travail pour les générations qui suivent », explique François Baroin, président de Troyes Champagne Métropole, qui a impulsé la candidature.

Revendiquée depuis le Serment de Nogent, elle s’organise autour d’un comité stratégique qui pilote les thématiques de sécurisation du foncier, d’emploi et formation, d’infrastructures et de planification territoriale. Il réunit les collectivités territoriales du Grand Est et d’Île-de-France, les chambres consulaires, les services de l’État, les agences de développement pour travailler en mode projet, quadriller, anticiper tous les besoins et faire pencher la balance du côté de Nogent au moment des choix.

Acteur de la production nucléaire depuis 1987 avec deux réacteurs en fonctionnement, le CNPE représente 4 % de la production nucléaire française, soit l’équivalent de l’alimentation de 3,5 millions de foyers. Le site mise sur son savoir-faire, son attractivité et son implantation favorable en Grand Est, aux portes de l’Île-de-France, bordé par la Seine, source froide directe nécessaire à l’activité.

Le Serment de Nogent a été scellé en février 2023. Les territoires ont donc dix ans pour s’organiser et pour former les hommes et femmes qui s’impliqueront dans la filière. 100 000 à l’échelon national, 10 000 dans l’Aube. « Les enjeux financiers sont énormes, 250 milliards d’intensité capitalistique tout confondu pour la puissance EDF, c’est aussi notre souveraineté nationale, c’est aussi notre souveraineté énergétique », rappelle François Baroin. « Nous voulons prendre de l’avance et surtout, être exemplaire, pour qu’EDF considère que ce site est le bon et que les autorités publiques au plus haut niveau de l’État prennent leur décision ».

Entre Chooz, Cattenom, Nogent, Bure et bientôt le Technocentre de traitement des métaux faiblement radioactif de Fessenhein, « la filière nucléaire est complète en Région avec 19 000 emplois et plus de 300 entreprises qui ont leur siège dans le Grand Est », souligne Franck Leroy, président de la Région. « Il faut anticiper le projet dans toutes ses dimensions. Pour la formation, nous avons déjà un certain nombre d’établissements identifiés à l’échelle du Grand Est. Nous devons faire bloc sur ce sujet hautement stratégique qui arrive une fois tous les 50 ans ». Une unité nécessaire également soulignée par Mathieu Orsis pour la Préfecture de l’Aube qui assure de son engagement pour lever les potentiels obstacles à cette candidature.

Génie civil, la voie active

À un moment charnière de la filière du nucléaire, entre le déploiement EPR de 4e génération pour sa relance, l’entretien des centres en fonctionnement et la fermeture de sites anciens, le GIFEN, groupement des industriels français de l’énergie nucléaire créé en 2018, prépare la feuille de route du nucléaire. Le programme MATCH met en adéquation les besoins à 10 ans, les caractérise et les compare aux ressources. 20 segments d’activité sont identifiés pour 97 métiers qui représenteront entre 125 000 à 160 000 ETP (équivalent temps plein).

L’Union des métiers du nucléaire accompagne ainsi les organismes de formation pour attirer les étudiants dans la filière. Le génie civil et l’assistance technique constituent les métiers les plus demandés. Ils manquent sur le chantier en cours de l’EPR2 de Penly, l’offre de formation de proximité ne permettant pas de répondre à la demande. Un retour d’expérience qui permet d’anticiper la demande pour ces chantiers d’excellence. « Notre programme, dans le cadre de nos 4 000 visites annuelles, est que tous les collégiens et lycéens du territoire doivent avoir visité au moins une fois la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine. C’est au collège que les envies commencent à se dessiner pour l’avenir », explique Estelle Obert directrice du CNPE de Nogent-sur-Seine.