Champagne / In Vino

Champagne : une démarche RSE "résolument disruptive"

Champagne. La certification RSE est devenue un des atouts indispensables d’une entreprise. Si elle s’est considérablement développée au sein des grands groupes, elle est beaucoup plus timide en Champagne. En effet, un seul détient une telle certification à ce jour : Chassenay d’Arce, dans l’Aube, avec le label « Vignerons engagés ».

Lecture 5 min
Champagne : une démarche RSE "résolument disruptive"
Manuel Hénon, Directeur général de la Coopérative d’Arce, présente le nouvel emballage pour le champagne bio Chassenay d’Arce, à base de chanvre. (Crédit : N. Desanti)

C’est dans le cadre du Viti Vini, et d’une conférence organisée par le Crédit Agricole ayant pour thème « La certification RSE, une obligation pour la Champagne », que Manuel Hénon, Directeur général de la Coopérative d’Arce — fondée en 1956 à Ville-sur-Arce, aujourd’hui 130 familles et 3 générations de vignerons — et membre du Conseil d’Administration des Vignerons engagés et de l’Union Nationale des Caves Viticoles, a pris la parole afin d’expliquer le cheminement ayant amené la coopérative à enclencher une démarche RSE. « Nous avons toujours été dans une démarche d’amélioration continue mais comme beaucoup, la période liée au Covid a accéléré nos réflexions », explique-t-il. « Nous avons tout de suite intégré nos salariés dans cette démarche pour qu’ils prennent conscience de leur utilité, non seulement au sein de l’entreprise mais plus globalement au sein de la collectivité. » Pour cela, la coopérative a effectué un audit en plus de points trimestriels, « une appropriation continue ».


>LIRE AUSSI : La transmission, préoccupation majeure en Champagne


C’est avec le label « Vignerons engagés », créé en 2007, développé au départ dans le sud de la France et représentant aujourd’hui 5% du vignoble français que la coopérative a ancré sa démarche. Ce dernier s’appuie sur quatre piliers fondamentaux : Agir pour l’environnement / garantir une qualité de la vigne au verre / soutenir le patrimoine local / offrir le juste prix pour le consommateur et le producteur. Basé sur un cahier des charges exigeant, le label est audité par l’AFNOR tous les 18 mois et s’appuie sur la norme ISO 26000. Pour l’aspect environnemental, concrètement, la coopérative s’est interrogée sur sa consommation d’énergie, sa production et sa gestion des déchets. Elle a réalisé des actions en coopération avec la société des chasseurs pour replanter des haies et installer des nichoirs à oiseaux. Mais sa démarche la plus structurante concerne l’éco-conception. La coopérative s’est interrogée sur le choix des matières concernant son packaging.

De 38% à 60% de ventes à l’export

« Déjà, nous supprimons la collerette qui est une des pièces les plus productrices de déchets, nous réduisons aussi le format de l’étiquette. Sur une feuille A4 nous pouvons en effet en sortir huit sans aucun déchet », précise le Directeur général de Chassenay d’Arce. La contre-étiquette, aussi, est retirée. Concernant l’emballage, choix a été fait de travailler en collaboration avec la Chanvrière de l’Aube et de mettre en place un packaging à base de feuille de chanvre. « L’avantage est qu’elle est très fine, on roule la bouteille dedans comme avec un papier de soie. Et on peut aussi y écrire un message. » (voir photo) « La Champagne a une image à la fois de tradition et d’innovation, il faut donc continuer dans ce sens et valoriser le fait d’avoir un temps d’avance », insiste Manuel Hénon.

Pour l’aspect sociétal, aller à la recherche du label « Vignerons engagés » a aussi été un moyen pour la coopérative de fédérer un peu plus ses adhérents autour d’une démarche HVE (Haute valeur environnementale). « C’est aussi une manière d’aller chercher la jeune génération plus sensible à la RSE. Le revendiquer c’est aussi pousser au questionnement », observe Manuel Hénon. La démarche est donc résolument « disruptive », mot prononcé à plusieurs reprises par Manuel Hénon pour qualifier le cheminement de la coopérative qui réduit, avec tous ces changements, de 60% ses déchets. Mais plus que la RSE, la coopérative a aussi transformé l’essai en termes de business, puisque Chassenay d’Arce est passée de 38% de ventes à l’export à 60%. « Nous commercialisons 1,3 million de bouteilles par an. La stratégie RSE a aussi eu un impact sur nos ventes à l’étranger auprès des publics japonais, d’Europe du Nord et surtout, des États-Unis. »