Champagne Famille Moussé : le meunier dans la peau
Terroir. Depuis qu’il est revenu sur l’exploitation familiale voici une vingtaine d’années, Cédric Moussé ne cesse de chercher à mettre le meunier en valeur, en respectant le terroir pour produire des vins aussi naturels que possible.
Sur les 17 hectares qu’il exploite à Cuisles, Jonquery et Châtillon-sur-Marne, le meunier - 85 % de l’encépagement, pour 12 % de pinot noir et 3 % de chardonnay - constitue le fil rouge des cuvées de Cédric Moussé. Et si aujourd’hui, pour les vignerons qui en maîtrisent les subtilités, le meunier n’a plus cette image un peu rustique qui lui a longtemps fait du tort, celui de Cédric Moussé élève encore le débat en donnant des vins tout en fraîcheur, aux bulles fines et délicates. On peut voir là l’atavisme d’une famille de vignerons de père en fils depuis 1629 et vinificateurs depuis 4 générations. Mais il est encore plus certain que ce résultat est dû à la volonté acharnée de Cédric Moussé de s’orienter vers une production ultra responsable.
« Dès 1976, mon père avait amorcé le virage de la transition écologique, notamment par l’enherbement des vignes. Je suis revenu sur l’exploitation en 2003, après être passé par un poste de responsable de la cuverie expérimentale du CIVC. En 2007, mon père, ne voulant plus utiliser de chimie, m’a confié la transition biologique de notre vignoble avec cette exigence très claire de produire propre et meilleur, en commençant par améliorer la santé de la vigne ». Mission accomplie en 2014, mais sans être certifié. Aujourd’hui, 85 % du vignoble exploité est certifié bio, et les nouvelles parcelles sont intégrées au fur et à mesure dans le processus de certification.
Le taux vibratoire
20 ans plus tard, le jeune vigneron avant-gardiste du début du millénaire n’a rien perdu de son enthousiasme, de sa curiosité, d’une vision d’un champagne plus « nature » (à tous les sens du terme), encore moins de sa volonté permanente d’expérimenter ! Après avoir procédé à des analyses de sève « comme on fait des analyses de sang » - 8 ans de labeur dans les rangs pour tendre vers la meilleure santé possible de la plante -, il passe à l’étape suivante, la vinification. Objectif : supprimer tout « maquillage » (soufre, produits œnologiques, boisé, sucres…).
Précurseur, il remplace le soufre de pétrole par du soufre de mine qu’il produit lui-même, développant, à cet effet, un générateur (protégé par un brevet) pour brûler la roche solide. Il expérimente la conservation des vins de réserve en cuves sous pression, sans soufre, pour en préserver la fraîcheur (« 6 ans de travail et un gros investissement pour 560 hectolitres de vins de réserve »).
En 20 ans, et pour son exploitation, il a divisé par deux les émissions de carbone sur chaque bouteille produite. Il travaille à présent autour de l’impact de la forme de la bouteille sur la qualité des vins.
Et puis… et puis, en dernier lieu, il s’intéresse de très près au taux vibratoire [1] du vin : « Quand on croise un taux vibratoire plus élevé que le nôtre, on éprouve une émotion. Les lieux de culte, par exemple, sont construits pour avoir un fort taux vibratoire. L’idée, c’est qu’un grand vin doit transmettre une grande émotion, du genre à vous mettre “les poils dans le dos“ ! » Sachant qu’il est possible de mesurer ce taux, Cédric Moussé a déposé des bouteilles de sa production dans une cave située sous l’autel d’une chapelle privée dans la Marne - « un lieu qui a un taux vibratoire 7 fois plus élevé que celui de ma propre cave, c’est énorme ». Le… but du jeu étant justement de vérifier si la conservation des bouteilles dans cet endroit riche en énergie influe sur le vin. Une première dégustation après une quinzaine de mois s’est révélée « incroyable » s’enthousiasme Cédric, qui entend bien vérifier scientifiquement le phénomène, fidèle à son tempérament cartésien. à cet effet, d’autres dégustations sont programmées à 24 puis à 36 mois. Patience et longueur de temps, etc.
Vers des vins de terroir
Sur le plan scientifique, justement, l’ancien président du Groupe des Jeunes vignerons de la Champagne et actuel administrateur du Syndicat Général des Vignerons se réjouit des moyens techniques et financiers que l’interprofession met aujourd’hui en œuvre pour faire progresser l’appellation, d’une part, et, d’autre part, « de la “porte ouverte“, depuis cet hiver, à l’expérimentation de façon officielle et déclarative. Les vignerons sont aujourd’hui sensibilisés aux diverses certifications. Ce qui nous conduit vers des vins plus “nature“ et plus naturels, des vins terroir. Je suis fier de participer à cette évolution. »
Une évolution qui lui permettra sans doute d’enrichir la gamme du Champagne Famille Moussé, composée de deux BSA (dont un fait à partir de vignes en conversion bio), deux 100 % meunier (dont un millésimé 2019), une cuvée argile verte (80 % meunier, 20 % pinot noir), un 100 % chardonnay et deux rosés (un d’assemblage, un de saignée), auxquels s’ajoutent deux ratafias. Une gamme dont… la gamme de prix s’échelonne de 36 € à 140 €. La production annuelle d’environ 135 000 bouteilles étant répartie pour 70 % à l’export (40 pays) et 30 % France.
[1] Le taux vibratoire est l’énergie dégagée par un objet, un lieu, une personne…