Champagne Christian Gosset : « absolutely pleasurable »
Champagne. Les amateurs américains ont déjà adoubé ce nouveau venu dans le monde du champagne. De fait, le champagne Christian Gosset s’annonce comme une pépite produite par « un jeune vigneron de 35 ans d’expérience ». Cela mérite, bien sûr, quelques explications.
Levons tout de suite un doute : oui, Christian Gosset a bien un lien avec la famille Gosset, qui fait remonter à Jean Gosset (1484-1556), « seigneur d’Aÿ et de Mareuil », la situation de propriétaire vigneron dont se flatte aujourd’hui la Maison portant toujours son nom. Christian Gosset, qui ne dédaigne pas l’humour, ajoute qu’il est d’ailleurs « le dernier des Gosset né à Aÿ ». Dont acte. Ses grands-parents (son grand-père, Gabriel, était le frère cadet d’André Gosset qui donna son nom à la Maison que l’on évoquait à l’instant) premiers récoltants-manipulants de la branche, ont fondé la marque Gosset-Brabant.
Ses parents, davantage tournés vers la polyculture, amoureux de la terre au sens noblement paysan du terme, poursuivirent néanmoins le développement de leur marque, avant de passer la main dans les années 80 à leurs deux fils, Michel et Christian, qui abandonnèrent vite l’agriculture pour se consacrer au champagne, sur 10 hectares de vignes. Michel, passé par Avize, et Christian, formé à la gestion et au commercial, se répartirent les rôles. Au cours des années 90, Christian intègre le Groupe des Jeunes du SGV, dont il deviendra vice-président.
« Structure ‘poil à gratter’, c’est ce Groupe des Jeunes qui a engagé la Champagne dans la démarche novatrice qui est aujourd’hui la sienne : remise en question, préoccupation de l’environnement, voyages dans le monde entier pour voir ce qui se faisait dans les autres vignobles, découverte des marchés export… Là, j’ai commencé à me passionner pour le terroir champenois. »
« Tout à écrire »
En même temps que la vigne, Christian cultive une ouverture d’esprit qui le fait bientôt se sentir à l’étroit dans son environnement immédiat. Il faut dire aussi qu’il s’intéresse à bien d’autres domaines (l’opéra, par exemple), que c’est un sportif accompli et entre autres un skieur émérite (taille modeste mais gabarit version gaillard, avec son caractère bien trempé et sa vision panoramique des choses, il aurait sans doute fait un redoutable demi de mêlée…). Il se prend même à rêver du champagne qu’il aimerait réaliser, comme ses amis du Groupe des Jeunes désormais un peu moins jeunes mais qui concrétisent les ambitions de leur jeunesse.
« J’avais envie d’exploiter tout le potentiel de mon vignoble, ce terroir d’Aÿ fait de puissance et d’élégance, riche, épicurien… »
« J’avais envie d’exploiter tout le potentiel de mon vignoble, ce terroir d’Aÿ fait de puissance et d’élégance, riche, épicurien… » Bref, sortir d’une zone de confort devenue inconfortable. En 2015, il profite d’une réorganisation du champagne Gosset-Brabant pour faire valoir son droit à l’indépendance. « J’avais 51 ans, encore de belles années devant moi, et une énergie à revendre. »
D’ailleurs, plus ou moins consciemment depuis quelques années, il avait mis en place les éléments indispensables à une production personnelle, notamment avec l’acquisition d’une maison bicentenaire disposant d’une grande cave, rue Jeanson à Aÿ. Il partage le vignoble familial avec son frère, se retrouve à la tête de 5 ha de vignes (en propre et en exploitation) « et tout à écrire ».
Le goût d’un vin identitaire
Tout à écrire, c’est-à-dire produire un vin identitaire qui soit l’assemblage de l’âge des vignes, du sol, de l’altitude, de l’exposition des parcelles, etc. Avec l’intention de retrouver dans ses bouteilles l’idée qu’il se fait du pinot noir d’Aÿ. Voilà comment ce jeune vigneron de 35 ans d’expérience, comme il aime à se qualifier, soucieux de précision et de rigueur, crée ses premiers assemblages avec la vendange 2016.
Pragmatique avant tout, Christian Gosset recherche la maturité de raisins issus d’une viticulture certifiée HVE/VDC, intervient le moins possible lors de la vinification, pratique la fermentation malolactique pour minimiser le soufre. Il a également cette faculté précieuse de savoir faire appel à des compétences extérieures pour ce qu’il ne maîtrise pas lui-même. Dès qu’il met ses premières bouteilles sur le marché, la presse française spécialisée encense son rosé et raconte son histoire. « Les importateurs du monde entier m’ont contacté. »
En pleine crise du Covid, alors que l’idée de ‘changer de vie’ se diffuse presque aussi rapidement que le virus, la clientèle s’identifie à son parcours. À New York, son plus gros marché export (15 %), les amateurs trouvent le champagne Christian Gosset « absolutely pleasurable ». À travers cet « absolument agréable » venu d’outre atlantique, succinct, presque laconique, tout est dit pourtant. Le champagne Christian Gosset apparaît comme une nouvelle pépite à découvrir sans tarder. Si l’intéressé nourrit la légitime satisfaction du travail reconnu, il garde la tête froide et son caractère d’éternel insatisfait. Mais il avoue s’amuser. Enfin ?