Jaguar Type 00 : un avenir en rose

Rose et bleu pâle : l’avenir de Jaguar sera couleur layette. Deux teintes faisant écho aux façades des immeubles Art déco du « vieux » Miami, paradis des riches dentistes retraités de la Côte Est. C’est là, dans le cadre du « Art week », un rendez-vous huppé mêlant art et mode, que la vénérable marque so british a choisi de dévoiler les deux concepts d’un surprenant coupé Type 00, appelé à inscrire la marque dans le futur. Le message est clair : Jaguar fait table rase de son passé pour se réinventer. Jusqu’au célébrissime logo à tête de félin, remplacé par un simple lettrage au graphisme sans âme. Une révolution : le mot a été galvaudé par le monde de l’automobile, l’utilisant au moindre changement d’entourage de calandre, mais pour une fois, il se justifie. Un simple coup d’œil à la silhouette monolithique du concept Type 00 suffit à s’en convaincre. Comme disait Bernard Blier dans Les Tontons flingueurs : « c’est du brutal ! »

Les concepteurs de ce coupé à nul autre pareil affirment s’être inspirés de la formule de Sir William Lyons, créateur de la marque en 1935 : « Copy nothing ». Effectivement, le concept Type 00 ne ressemble à rien de connu, même si la face avant verticale, seulement éclairée de quatre fins traits lumineux en guise de phares minimalistes, peut faire penser à une Rolls-Royce Phantom. La calandre, en moins, la Jaguar en étant dépourvue. Tout comme elle se passe de vitre arrière, remplacée par des caméras. La poupe, verticale et épurée, est la réplique de la proue. De profil, ce grand coupé dont les ailes gonflées peinent à contenir les roues de 23 pouces, semble se souvenir qu’il est le lointain héritier de quelques-uns des plus beaux modèles jamais mis sur la route. Son capot interminable et l’arc tendu de son pavillon peuvent être considérés comme un hommage à l’inoubliable Type E, que Enzo Ferrari lui-même, pourtant peu suspect d’aménité pour les autres marques, considérait comme la plus belle voiture de tous les temps.

Concurrencer Rolls-Royce et Bentley

Les surprises stylistiques se poursuivent à bord. Le choc est encore plus fort quand on se remémore l’ambiance unique des Jaguar qui a fait beaucoup pour la notoriété de la marque. Cuir, bois précieux, chrome, moquette épaisse : cet univers a longtemps accompagné les clients mais avait déjà été sacrifié sur l’autel de la normalisation. Malgré une certaine qualité de présentation et d’aménagement, les récentes Jaguar étaient rentrées dans le rang et ne se distinguaient plus de leurs concurrentes pour susciter cet élan du cœur. Le Concept Type 00 semble venu d’un autre monde : pierre de Travertin, laiton, multiples écrans, volant ovoïde… L’habitable, séparé en deux par une longue arrête centrale de 3,20 m, déconcerte. Comment cela se traduira-t-il sur les versions de série ?

Le constructeur avait annoncé il y a quelques mois sa conversion définitive aux motorisations électriques. Sans surprise, le Coupé Type 00 est animé par des blocs à batterie sur lesquels il ne donne aucune indication de puissance. On sait que ce n’est pas un problème et que les kWh seront abondants. À l’heure où des SUV électriques dépassent allégrement l’équivalent de 500 ch, aucune crainte à avoir. Seules précisions apportées sous le soleil automnal de Floride, une autonomie jusqu’à 770 km et une capacité à récupérer 321 km de marge en seulement un quart d’heure sur une borne de recharge rapide.

Pour achever de brouiller encore davantage les cartes, Jaguar a annoncé que le modèle inspiré par ces coupés rose et bleu serait une berline 4 portes, assemblée en Angleterre. Elle sera diffusée dans un réseau exclusif, avec notamment une boutique située dans le Triangle d’Or parisien, avec l’objectif de concurrencer Rolls-Royce et Bentley. Voire Dior et Chanel… Rien que ça ! Rendez-vous est donné pour fin 2025. D’ici là, les distributeurs Jaguar liquideront les stocks jusqu’à épuisement puisque l’assemblage du dernier modèle encore produit, le SUV F-Pace, s’arrêtera définitivement dans quelques jours.