Bornes de recharge publiques : loin du compte
Automobile. L’État a failli à ses promesses. Il devait y avoir 100.000 bornes publiques fin 2021. On en dénombre un peu plus de la moitié seulement. Un constat d’échec.
« Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent » : la formule de l’ancien président du conseil de la IVe République, Henri Queuille est usée jusqu’à la corde. Mais elle reste toujours d’actualité. L’Etat, sous les ères Hollande et Macron, répète à l’envi que seront implantées 100 000 bornes de recharge publiques pour accompagner le développement de la « mobilité électrique ». Avec une date d’échéance : le 31 décembre 2021. Nous y sommes. Et les 100 000 bornes maintes et maintes fois promises ne sont pas au rendez-vous. Loin s’en faut. Dommage pour ceux qui ont fait confiance à ceux qui nous gouvernent et ont fait l’acquisition d’une voiture électrique. À coup d’incitations financières, l’état encourage l’achat ou la location longue durée de voitures 100% électriques.
De l’autre coté, les constructeurs sont contraints de se plier à marche forcée à cette volonté européenne alors même qu’ils avouent mezzo vocce que l’on va droit dans le mur : enchérissement des voitures, marché artificiellement soutenu par les aides, destructions massives d’emploi à venir dans le secteur.... Peu importe, le discours officiel est univoque : hors de la voiture électrique, point de salut. Avec des résultats commerciaux réels.
Grâce aux aides généreuses payées, faut-il le rappeler, par l’ensemble des contribuables - même eux qui n’ont pas le permis de conduire et encore moins de voiture - le marché des voitures électriques a très fortement progressé. Sur les onze premiers mois de l’année, près de 139 000 véhicules 100% électriques ont été immatriculés contre 90 000 un an plus tôt, auxquels il faut ajouter 125 000 hybrides rechargeables (59 500 en 2020).
Plus de 700 000 voitures en quête de bornes publiques
Au total, selon l’AVERE France, l’association para-étatique de promotion de la mobilité électrique, il y a 470 000 véhicules électriques en circulation en France. Il convient d’y ajouter 246 000 hybrides rechargeables, susceptibles d’avoir besoin de se brancher sur une borne publique. C’est là que le bât blesse. Le 31 octobre dernier, l’AVERE dénombrait 49 914 points de recharge publiques répartis dans 20.621 stations. Deux fois moins qu’annoncé ! Et encore, ce chiffre résulte d’un effort colossal pour résorber le retard puisqu’environ 20 000 bornes ont été installées en un an « Autant qu’entre 2013 et 2018 » note l’AVERE, pointant du doigt involontairement le problème. Seulement 8 500 au total ont été implantées au cours des années 2017, 2018 et 2019.
Malgré cette accélération tardive, le compte n’y est pas. Dans le détail, ce n’est pas mieux. Plus de la moitié des bornes délivrent une puissance inférieure ou égale à 22kW, 44% entre 22 et 50kW et seulement 4% plus de 50kW. Autrement dit, sauf exception, la patience s’impose avec des temps de recharge longs ou très longs. Faire le plein de courant en moins d’une demi-heure comme certains modèles le permettent est un doux rêve. D’autant plus qu’une borne sur quatre n’est pas en état de fonctionnement.
Un casse-tête pour les automobilistes des grandes villes
Avec d’un coté 50.000 bornes et de l’autre près de 720 000 voitures en quête d’un point recharge publique, on comprend que les choses ne sont pas simples. Selon le décompte de l’AVERE France, cela fait 1 point pour 9 voitures 100% électriques et 1 pour 14 si on y ajoute les hybrides rechargeables. On est largement en-dessous des préconisations européennes. Et encore davantage si on tient compte des bornes hors service, de leur très inégale répartition à l’échelon du territoire avec de fortes disparités selon les régions et les zones rurales ou urbaines.
On ne doute pas que les choses finiront par se régulariser au fil d’un temps plus ou moins long. Même en poursuivant sur le rythme engagé depuis un an, il faudra encore plus de deux ans pour arriver péniblement aux 100.000 bornes. En attendant, il est conseillé d’être débrouillard ou patient, voire les deux en même temps. Dans l’affaire, les lésés sont ceux qui ont cru à la bonne parole de l’état et ont acheté des voitures électriques ou hybrides rechargeables alors qu’ils ne disposent pas de point de recharge privé facilement accessible.
Surtout s’ils habitent en agglomération où l’habitat individuel n’est pas la règle et n’ont pas de solution alternative aux bornes publiques. Ils risquent d’être confronté à la difficulté de trouver un point de recharge disponible. Et fonctionnel. On laissera la conclusion à Ségolène Royal, qui, lorsqu’elle était ministre de l‘environnement, s’était engagée, elle aussi, sur l’objectif de ces fameuses 100 000 bornes : « J’ai suffisamment exercé de fonctions ministérielles pour savoir que l’Etat ne tient jamais ses promesses ». Parole de spécialiste !