Loïc Voluer
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Loïc Voluer

De l’urbanisme à la gestion de cimetière

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Portrait : Loïc Voluer
Loïc Voluer est le gérant principal de Logiplace (Crédit : N. Champenois)

« Non, le cimetière, ce n’est pas que triste, il peut y avoir quelque chose d’intéressant derrière », affirme Loïc Voluer. En 2019, le conseiller juridique en urbanisme a créé Logicim, un logiciel de gestion de cimetière. Son objectif : donner aux collectivités les clés leur permettant d’assurer sereinement cette mission de service public.

« Tout est parti d’une sollicitation d’un maire me demandant de lui refaire son plan de cimetière. Cette requête m’a incité à voir plus loin en sollicitant mon réseau de collectivités. Je me suis renseigné auprès des secrétaires de mairie pour savoir ce qui posait problème dans la gestion du cimetière, explique-t-il. Et j’ai fait le constat que c’est par peur de mal faire, que finalement on ne fait pas. D’où mon idée de créer un logiciel dédié ». Si on lui avait demandé, comme à n’importe quel jeune, ce qu’il voulait faire plus tard, il n’aurait sûrement pas répondu qu’il aimerait gérer des cimetières. Dès l’enfance, il a d’ailleurs dit à ses parents qu’il ferait du droit : « Tout a démarré quand j’ai visionné le téléfilm juridique sur l’affaire Seznec, avec Christophe Malavoy. Respecter le droit, l’appliquer, défendre les droits, ça m’a tapé dans l’œil quand j’avais neuf ans ».

Bac S en poche, il commence par faire une classe prépa littéraire. En 2002, alors qu’il est en Fac de Droit à Reims, il se découvre, en 3e année, « une appétence pour le droit public et tout ce qui est, au sens latin du terme, la res publica, la chose publique, qui [le] passionne et en particulier le droit de l’urbanisme ». Un droit pluridisciplinaire où il faut connaître l’environnement, la géologie, l’écologie, la construction, l’architecture, la démographie et la sociologie. Et où il est « vraiment dans son élément, étant très curieux de nature ».

Création d’une première entreprise

En 2007, avec en poche un master IATEUR (Institut d’aménagement des territoires, d’environnement et d’urbanisme de l’université de Reims), mention très bien, il crée sa première entreprise. « Avec un associé, j’ai créé MT Projets, un cabinet de conseil juridique en urbanisme. Sans aucune expérience, on a bataillé et découvert les appels d’offres. Et le concret des collectivités. Cela a duré une dizaine d’années », se souvient Loïc Voluer. « C’est en novembre 2017 qu’un de nos clients, le maire de Saint-Étienne-sur Suippe (Marne), nous a demandé de refaire son plan de cimetière. Il avait pensé à nous en faisant le rapprochement entre urbanisme et savoir-faire de plans, tout en se disant que le côté juridique pourrait l’aider dans la gestion », souligne-t-il.

« On veut devenir la référence française de la gestion de cimetière. »

Plutôt que de faire un coup d’essai, Loïc Voluer décide d’extrapoler sa demande et analyse que le problème dans la gestion de cimetière tient aux procédures juridiques, à la fois longues et complexes : « Là, je me dis : il y a vraiment quelque chose à faire, il faut créer un logiciel ». Il commence alors par se rapprocher d’un développeur informatique, Minh Thai, qui lui confirme la faisabilité d’un logiciel dédié à la gestion de cimetière. Prototype en mains et avec le soutien et les conseils de la Région, c’est en 2018 qu’il est incubé à la technopole de l’Aube. Avant d’obtenir divers financements (Initiative Aube, Réseau entreprendre Champagne-Ardenne, Région, banque).

Création de Logiplace en 2019

Loïc Voluer fonde Logiplace en février 2019 et continue sa recherche de financements auprès de Bpifrance, qui trouve le projet innovant et intéressant. « Nous avons emménagé dans notre premier local en juillet 2020, avec cinq personnes. Cela fonctionne bien, nous avons une bonne réception de la part des collectivités », se félicite le chef d’entreprise aubois. L’équipe de Logiplace s’agrandit en 2022, elle comptera 13 ou 14 personnes à la rentrée prochaine. « Nous avons fêté notre 100e client en février 2022 », sourit-il.

Au départ, l’épicentre de sa clientèle se situait dans la Marne, puis il a commencé à précommercialiser en Seine-et-Marne puis de nouveau dans la Marne – les clients de sa précédente entreprise lui ont renouvelé leur confiance – et dans le Loiret, l’Aube et principalement le grand quart nord-est. Sans oublier plusieurs clients en Savoie, dans le Massif Central, en Gironde et dans les Pays de la Loire. « Un quart de nos clients sont dans l’Aube et les trois quarts dans les autres départements », précise le gérant de Logiplace.

Digitalisation de la gestion de cimetières

L’entreprise auboise propose aux collectivités la digitalisation de toute la gestion de cimetière : « La digitalisation du plan, interactif, la numérisation et l’indexation des archives de concessions dans le logiciel permettent à la collectivité de savoir en cinq secondes ce qu’elle peut et ne peut pas faire sur chaque concession. Grâce à une automatisation des procédures et une vérification continuelle des données, elle est sûre d’être dans les clous de la loi. Et d’éviter de faire une erreur. Pour être sûr que tout est bien fait et qu’il n’y a pas de mauvaise surprise pour la famille dans un moment de deuil. C’est ce qui fait sens aujourd’hui pour nos employés, de vraiment participer à quelque chose d’utile. Oui il s’agit de la mort, mais la façon dont on gère ce qui l’entoure compte. »

Loïc Voluer met un point d’honneur à tout mettre en œuvre pour créer une culture d’entreprise très forte. Car « travailler « dans le cimetière », ce n’est pas forcément la joie. Alors il vaut mieux avoir des mécanismes RH forts avec une culture qui se ressent au niveau des clients ». Fin 2021, Logiplace a été acceptée dans l’accélérateur de start-up ScalEnov. De quoi inciter l’équipe à aller encore plus loin dans l’innovation de la gestion de cimetière. De façon à créer un vrai écosystème allant au-delà de la collectivité : « On veut devenir la référence française de la gestion de cimetière. On est une start-up, avec un élan d’innovation, de remise en cause, d’agilité. On a envie de continuer cette dynamique là, de ne pas se reposer sur nos lauriers. De faire ressentir tout sauf qu’on est en train de gérer un cimetière ».