« La volonté de faire un thé plus durable a finalement abouti à la création d’un produit plus sain, plus pratique et qui conserve sa saveur et ses bienfaits. Quand on va dans le bon sens, les avantages convergent ». C’est pendant un voyage d’études à Vancouver (Canada) que Camille Douay a découvert en 2014 le mouvement zero waste (zéro déchets) alors qu’on en parlait encore très peu en France. Depuis, cette problématique n’a cessé de la préoccuper. Au point de la faire s’interroger sur « notre façon de boire le thé, qui est un véritable gaspillage alimentaire : on jette chaque année en France plus de 15 000 tonnes de plantes comestibles, aux nombreux bienfaits et propriétés ».
« Pendant un an, le thé zéro déchet zéro gaspillage a été le sujet de mon projet étudiant »
De ce constat naîtra son projet entrepreneurial. C’est ainsi qu’elle imaginera Absoluthé, un concept de thés et infusions biologiques finement moulus pour devenir solubles dans l’eau. Ce nouveau rituel de dégustation du thé - inspiré de celui du Matcha, mais adapté au goût européen -, Camille Douay aura mis le temps de le laisser infuser. Bac S en poche en 2006, la Picarde d’origine fera un an d’école d’ingénieur. Avant de changer de voie et de suivre une classe prépa littéraire : « J’ai commencé à comprendre que je souhaitais oeuvrer pour le développement durable par l’intermédiaire de l’aménagement du territoire. Je suis alors partie en région parisienne suivre des études d’urbanisme », se souvient la jeune femme dont l’objectif était alors de contribuer à créer des villes durables et à préserver l’équilibre entre les villes et les campagnes.
Un retour sur les bancs de l’école
À la fin de ses études, des sujets de recherches académiques menées dans des labos de recherche de Sciences Po et de Ponts et Chaussées l’amèneront à voyager à Vancouver (Canada) et à Amsterdam (Pays-Bas) pour des enquêtes de terrain. « Je trouvais le sujet passionnant mais la manière de travailler assez solitaire », déplore Camille. C’est pourquoi, son orientation prend un virage à 180° lorsqu’elle décide d’aller travailler chez Kolibree, une start-up qui lancera la première brosse à dent connectée : « J’ai aimé travailler en équipe avec un objectif commun et un rythme de développement de projet soutenu. Je m’y suis beaucoup plu en termes de méthodologie de travail, mais moins dans les sujets car je m’éloignais des objectifs que je m’étais définis », explique-t-elle.
En 2016, suite à ce constat, elle décide de retourner sur les bancs de l’école pour suivre des études de RSE, Responsabilité sociétale des entreprises, à Saint-Quentin-en-Yvelines. « C’est le développement durable, côté entreprises », traduit-elle. Cette reprise d’études lui fera revenir à l’esprit la frustration générée par notre façon de boire le thé qui induit un important gaspillage alimentaire. « Pendant un an, le thé zéro déchet zéro gaspillage a été le sujet de mon projet étudiant », résume la passionnée.
Concrétisation du projet
Fin 2017, après avoir obtenu son master 2 RSE Environnement, elle s’attelle à la transformation de son projet étudiant en véritable projet d’entreprise : « la première étape a consisté à trouver un partenaire qui puisse me permettre de moudre de manière ultrafine les feuilles de thé. Je me suis tournée vers le Food’Inn lab de l’université AgroParisTech ». Franchir ce cap lui permettra de créer sa micro-entreprise en 2018, avec un premier produit et un premier site de e-commerce. La mise en place des réseaux sociaux et la création d’événements pour faire découvrir Absoluthé dans une première version, artisanale, via le thé et les tisanes bio, sans additif, lui permettra de vérifier le concept.
« On projette maintenant d’être distribué en magasin bio et dans les enseignes spécialisées dans la vente en vrac »
Parallèlement, l’incubation de l’entreprise en université lui facilitera la réalisation de tests biochimiques, afin de vérifier que les plantes conservent leurs bienfaits lors de la mouture ultrafine. « Les signaux étant au vert, j’ai souhaité être accompagnée par un associé ayant des compétences complémentaires, orientées vers la finance et la gestion », souligne la présidente et fondatrice d’Absoluthé. David Snanoudj deviendra ainsi directeur général et associé de l’entreprise.
Création d’un site de production
Cette période de changement d’échelle sera marquée par la crise sanitaire, avec pour conséquence un ralentissement de l’installation de leur propre site de fabrication. Camille et David profiteront cependant de cette période pour suivre une formation dédiée à l’innovation agro-alimentaire. « On a également mis ce temps à profit pour opérer une refonte graphique et du packaging d’Absoluthé », fait-elle valoir. Si les boîtes en métal dans lesquelles sont conditionnés les produits plaisent beaucoup esthétiquement parlant, leur qualité ne s’arrêtent pas là. « Elles sont conçues afin de conserver le produit et pour que la cuillère soit intégrée dans le couvercle – un petit dessicant alimentaire absorbe l’humidité. Elles sont faciles à transporter, rechargeables et recyclables ».
Lauréate de Plug&Start en 2019, l’entreprise sera incubée à la Technopole de l’Aube. En 2021, après s’être installée à Nogent, en Haute- Marne, elle est récompensée par Innovafood, valorisant les entreprises engagées pour une alimentation plus naturelle, plus saine et plus durable. « Nous avons obtenu deux distinctions : nous avons été récompensés dans la catégorie boisson et la marque a décroché l’award d’or ».
Les produits d’Absoluthé sont actuellement commercialisés via le site de e-commerce ainsi qu’en épicerie fine. « On projette maintenant d’être distribué en magasin bio et dans les enseignes spécialisées dans la vente en vrac. On a également des perspectives en ce qui concerne l’utilisation de nos produits en tant qu’ingrédients pour les métiers de bouche, les biscuiteries, les chocolateries ou autres industries agroalimentaires ».