Manuel Henon
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Manuel Henon

Un parcours millésimé sur fond d’humanisme.

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Photo de Manuel Henon
Manuel Henon, directeur de Chassenay d’Arce, accueillera les 21 et 22 mars prochain les 11e rencontres de Vignerons Engagés, label RSE national de développement durable. (Crédit : Chassenay d’Arce)

« On peut imaginer les plus belles entreprises du monde, s’il n’y a pas des hommes et des femmes pour les faire avancer, ça ne marche pas. Je suis quelqu’un de curieux et qui fonctionne avant tout aux relations humaines. »

À 54 ans, Manuel Henon, le discours posé et le regard pétillant, impulse sa vision de l’entreprise Chassenay d’Arce à l’équipe de trente collaborateurs permanents qui peut passer à plus de cent personnes lors des pics d’activité. Bourguignon d’origine désormais dans le Champagne, il déroule un parcours semé de belles opportunités.

Quand en janvier 2020, il prend ses fonctions de directeur au sein de Chassenay d’Arce, la Maison de Vignerons vient de quitter l’Union Auboise. Il faut alors tout réécrire : organiser les équipes commerciales, le marketing, la communication et accélérer la stratégie de développement notamment à l’international, s’inscrire dans une démarche RSE structurante et volontaire. Puis, le 17 mars 2020, tout s’arrête !

« Il n’y a plus personne sur la route et en même temps des oiseaux partout. Il y a une certaine tension dans la lumière. Nous avons déjà oublié cette période… », se souvient Manuel Henon, derrière ses lunettes rondes. Pourtant, il reste serein. Impuissant face à la fermeture des marchés et des pays vers lesquels il exporte. Il a une nouvelle activité et une équipe à mettre en place.

Confinement Covid, là où tout commence

« Finalement, ce n’est pas un mauvais souvenir. Cela a été un moment de création où nous ne nous sommes pas autolimités pour imaginer des stratégies. Nous n’avions plus de référentiels et donc un certain espace de liberté intellectuelle. Je reste intimement convaincu que nous n’aurions pas pu réussir la transformation de l’entreprise et sa mise en place aussi rapidement s’il n’y avait pas eu le Covid. » Le mode de gouvernance partagée entre le président, Franck Barroy, et Manuel Henon fonctionne bien, ils se répartissent les tâches chacun dans leur domaine et entraînent ensemble les équipes.

Avec beaucoup de communication et de partage, la période Covid permet de définir le plan à court et moyen terme de Chassenay, la mise en place de groupes de codéveloppement qui impliquent les collaborateurs, la politique générale et ses indicateurs de suivi.

« L’humain entraîne les équipes et derrière il faut du sens et donner une trajectoire. »

« En arrivant chez Chassenay, J’ai demandé à tout le monde de remonter les manches, de participer à la création du projet. J’avais ma légitimité de dirigeant, d’organisateur, de planificateur, de financier… En revanche, la distribution du champagne, je connaissais ça dans les bouquins, au travers des bilans de Maisons de champagne que j’avais pu faire et par mes rencontres avec des chefs d’entreprises. Arriver en mode « y a qu’à, faut qu’on » ne fonctionne pas. Entre une idée, la réalité du terrain et sa mise en œuvre, il faut s’appuyer sur son équipe, sinon cela ne fonctionne pas. Les collaborateurs sont impliqués. Ils sont dans le match, mouillent le maillot pour la Maison. Nous avons eu un incendie important récemment dans le bâtiment d’origine. Tout le monde s’est mobilisé. L’humain entraîne les équipes et derrière il faut du sens et donner une trajectoire. Quand les collaborateurs savent où va l’entreprise et qu’on les laisse au sein de cette trajectoire suivre leur bonhomme de chemin, c’est épanouissant pour eux, pour moi, et cela se ressent sur l’extérieur ».

Une affinité avec le monde agricole et viticole

Manuel Henon « véritable couteau suisse », comme il se décrit lui-même, suit un itinéraire atypique. Avec un bac littéraire en poche, il fait des études de droit des affaires et droit des contrats, une école de commerce puis un service militaire en tant qu’officier. Il prend son premier poste de conseiller en gestion de patrimoine aux AGF et déjà apporte sa touche humaine.

« Et je faisais aussi l’intégration des jeunes collaborateurs ! J’avais envie d’un projet où je pouvais prendre en charge des équipes. Puis j’ai eu l’opportunité d’entrer au Crédit Agricole comme responsable d’agence. C’était un pari à l’époque pour eux d’embaucher quelqu’un de jeune et venant de l’externe. »

Il y reste vingt ans et occupe huit postes différents dont notamment celui de responsable de centre d’affaires pendant plus de dix ans. Il se forme en parallèle dans le cadre du parcours directeur du Crédit Agricole. « Je me suis éclaté au centre d’affaires ! J’ai besoin que mon travail ait un sens et de me sentir utile. Utile aux autres, à la collectivité, à des porteurs de projets, à des entreprises industrielles, agroalimentaires et viticoles. J’ai échangé avec des gens extrêmement différents, ça m’a vraiment passionné. »

Certaines rencontres essentielles ont ensuite changé sa trajectoire. Comme celle de Gérald Richard, « un très grand entrepreneur » qui le débauche du secteur bancaire pour développer le groupe automobile Amplitude. Puis Franck Barroy, le président de Chassenay d’Arce qui lui propose de prendre les rênes de la Maison de Vignerons. « J’ai toujours eu des affinités avec le monde agricole et viticole. J’aime son humanité mais aussi cette rudesse et l’authenticité qu’il dégage. J’avais toujours dans un coin de ma tête le souhait de prendre la direction d’une Maison de champagne et d’avoir la main pour impulser le changement ». Vœu exaucé, champagne !