Alexandre Zulick
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Alexandre Zulick

De la fibre artistique...à celle des affaires.

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Photo d'Alexandre Zulick
RBN a remporté un prix de l’innovation avec la gamme de brosses aux fibres bleues synthétiques « Bleu Polytop ». (Crédit : PR)

« J’aime à dire que je suis né dans la brosserie. Car dès l’âge de cinq ans, quand je n’étais pas à l’école, je passais de nombreuses heures dans cet espace cher à mes parents, à Renwez. J’ai grandi dans ce milieu, où, durant les vacances scolaires, je suis passé par la plupart des postes de fabrication de manchons et de brosses. Adolescent, je me souviens avoir créé mes premiers visuels et pris des photos de différents articles », se remémore Alexandre Zulick.

Il découvre donc le métier de technicien textile de manière précoce, dans lequel son père, Tadek Zulick, avait débuté à la Draperie sedanaise Lombard avant de devenir représentant de la société Solfin, spécialisée dans la vente de linge de maison et de prêt-à-porter haut de gamme. En 1980, ce dernier se lance dans la brosserie, en reprenant une PME artisanale de neuf personnes alors dirigée par Roger Thoué.

« Mon père a développé cette affaire grâce à de nouveaux procédés de fabrication. Mais dans les années 90, notre plus gros distributeur nous a lâché en rachetant un concurrent. Un coup dur qui, à l’époque, nous a fait perdre la moitié du chiffre d’affaires. Reste qu’il ne s’est pas démonté. Fort de la confiance de ses fournisseurs, il a vendu ses produits en nom propre sous la marque Ridremont Brosserie Nouvelle (RBN), a ajouté d’autres références à son catalogue dans le domaine de l’outillage du peintre tout en misant sur le savoir-faire brossier ancestral de l’entreprise. »

Si bien qu’en 2000, Ridremont Brosserie Nouvelle déménage de Renwez aux Mazures, dans un bâtiment industriel flambant neuf de 2 250 m². Un bel outil de travail permettant de réinvestir dans de nouvelles machines, de disposer d’un large espace de stockage et de travailler de façon plus professionnelle.

À cette période, Alexandre Zulick, après avoir fréquenté les lycées Saint-Rémy de Charleville-Mézières et Jean Talon de Châlons-en-Champagne, entame une prépa HEC. Il décroche à la suite une place à l’Institut Supérieur de Commerce de Paris où il obtient, en 2009, un double diplôme : un Master ISC et un MBA Entrepreneuriat.

« Ayant une grosse fibre artistique, j’ai beaucoup apprécié cette expérience parisienne au cours de laquelle j’ai visité un maximum de musées, de théâtres et de richesses architecturales. »

En 2010, le jeune homme se dirige vers les métiers du marketing et de la communication en devenant chef de projet Search Marketing digital avant d’être ensuite consultant en développement stratégique d’entreprises.

« J’ai fait mes premières armes en aidant des porteurs de projets à aller plus loin dans leurs affaires, en faisant des montages de business plans et la promotion de leurs produits. La fibre entrepreneuriale que m’avait communiqué mon père est alors revenue sur le devant de la scène. »

Retour aux sources

En 2011, son père lui apprend que son associé veut vendre ses parts (49 %). Il propose alors à Alexandre de les racheter en devenant du même coup directeur général délégué de Ridremont Brosserie Nouvelle. « J’ai accepté ce deal et acquis les parts. Et après avoir exercé un an à Paris, tout en prenant mes marques dans les Ardennes, j’ai ensuite consacré tout mon temps à RBN en assurant la co-gestion de l’entreprise avec mon père qui aura travaillé 42 ans dans ce métier. »

N’ayant alors qu’un savoir théorique, Alexandre Zulick apprend à devenir un brossier. « Je me suis attaché à faire plus ample connaissance avec l’univers qui gravite autour de cette activité. »

En commençant à développer ma propre vision et à dépoussiérer certaines choses. Tant dans la gestion que dans l’image que je voulais donner à la société avec l’idée forte de réussir un trait d’union entre la tradition et la modernité.

« Car je voulais me distinguer de la concurrence en faisant de RBN une brosserie haut de gamme. Nous avons ainsi remporté un prix de l’innovation avec la gamme de brosses aux fibres bleues synthétiques « Bleu Polytop ». J’ai aussi apporté ma touche en travaillant sur la communication (refonte du logo, création d’un site internet…) et en donnant un côté plus punchy à l’entreprise. »

220 000 brosses vendues à l’année

Désireux de faire reconnaître le savoir-faire d’excellence du personnel, le jeune dirigeant devenu Pdg en 2022, s’est aussi employé à obtenir le prestigieux label national « Entreprise du Patrimoine Vivant », décerné par le ministère de l’Economie.

Aujourd’hui, Ridremont Brosserie Nouvelle qui emploie 20 salariés (opérateurs sur machines, préparateurs de commandes, commerciaux et membres du back office), réalise un chiffre d’affaires de 2 millions d’euros dont 10 % à l’export vers les Etats-Unis (principalement New York), l’Allemagne, la Belgique, la Réunion et Tahiti. Elle gère 5 000 commandes pour 1 500 clients actifs, en produisant à l’année 220 000 brosses et 60 000 manchons de rouleaux à peindre, tous étiquetés made in France et munis d’un petit sanglier ardennais.

Une clientèle trouvée dans le secteur du BTP, les entreprises de peinture, les grossistes indépendants, les artisans peintres, les écoles de formation et les Compagnons du Tour de France. Mais aussi dans l’agriculture, l’agroalimentaire, la maroquinerie, l’industrie lourde ou encore la cosmétique via les blaireaux de rasage.

« Nous assurons par ailleurs une activité de négoce d’outillages pour les professionnels du bâtiment (adhésif, abrasif, produits électro-portatif, équipement de protection individuelle). Et j’aime dire que dans notre catalogue, on trouve tout pour exécuter un chantier, de sa préparation jusqu’au nettoyage en passant par l’exécution et l’application des différentes peintures. »

Ne regrettant pas d’avoir opté pour ce marché de niche, « ce qui est rare chez d’anciens élèves d’écoles de commerce », Alexandre Zulick est ravi de faire un métier complet pour lequel « aucune journée ne se ressemble ».