Entreprises

Que retenir de la Loi de Finances 2024 ?

Fiscalité. Attendue chaque année pour ses nouveaux dispositifs en matière fiscale et sociale, la Loi de Finances 2024 n’apporte pas de bouleversements majeurs, mais un panel important de mesures de continuation et de prorogation de l’existant. Revue d’effectifs.

Lecture 12 min
Photo de Mes François Croison, David Mennetret, Virginie Villemain et Stéphane Weibel
Les notaires Mes François Croison et David Mennetret et les experts-comptables Virginie Villemain et Stéphane Weibel présentent les nouvelles mesures inscrites dans la Loi de Finances 2024 pour le compte de la Chambre interdépartementale des notaires de la Cour d’appel de Reims et pour l’Ordre des experts-comptables Région Grand Est. (Crédit : BB)

Fiscalité des entreprises et loi relative au partage de la valeur

Régime des meublés et micro BIC

La LF 2024 prévoit deux changements majeurs : pour les locations de meublé de tourisme non classés, le seuil de chiffre d’affaires est réduit de 77 700 euros à 15 000 euros pour bénéficier du régime micro-BIC. « Cela traduit la volonté de l’administration de contraindre les propriétaires de meublés non classés à devenir classés », explique Me François Croison, notaire à Tinqueux. De plus, ce même régime bénéficie d’un taux d’abattement qui est désormais réduit de 50% à 30 %.

« De nombreuses villes prennent des mesures et certaines copropriétés interdisent ce type de location. Les perdants de cette nouvelle disposition sont les locations de tourisme non classés, ce sont des meublés de tourisme qui ne répondent à aucun critère ».

Zones France Rurale Revitalisation (ZFRR)

En 2024, l’Etat a décidé de regrouper en un seul et même dispositif les zones ZRR, BER et ZorCoMir.

« Tous ces dispositifs s’arrêtent au 30 juin prochain et seront remplacés dès le 1er juillet par le ZFRR », explique Stéphane Weibel, expert-comptable. Cette nouvelle zone éligible aux micro-entreprises prévoit que le siège de l’entreprise soit implanté dans la ZFRR et que l’ensemble de l’activité de l’entreprise soit réalisé au sein de cette zone.

Impôt sur les sociétés

Bonne nouvelle pour les entreprises : la mesure prévoyant un taux réduit d’Impôt sur les Sociétés (IS) à 19% en cas de vente immobilière est prorogée. « Ce régime est même étendu aux opérations mixtes comprenant au moins 75% de logements », précise le notaire Me David Mennetret.

Crédit d’Impôt en faveur de l’industrie verte (C3IV)

Dans le cadre de l’encouragement de l’industrie verte, le C3IV prévoit une réduction d’impôt calculée sur les dépenses engagées à l’occasion du plan d’investissement soumis à agrément (bâtiments, installations, machines, terrains, brevets, licences, AOT du domaine public constitutives de droits réels) à hauteur de leur prix de revient. « Le taux du crédit d’impôt est de 20%, il est porté à 30% pour les moyennes entreprises et 40% pour les petites entreprises, avec un plafond de 150 M€ », précise Virginie Villemain, expert-comptable.

Réductions et crédits d’impôt divers

La réduction d’IS pour mise à disposition d’une flotte de vélos est prorogée jusqu’au 31 décembre 2027, tout comme les crédits d’impôts production d’œuvres phonographiques et musicales, d’œuvres cinématographiques ou audiovisuelles étrangères, de spectacles vivants musicaux ou variétés et représentations théâtrales. Le crédit d’impôt en faveur des métiers d’art est quant à lui prorogé jusqu’au 31 décembre 2026.

Impôts locaux

Les cotisations CVAE et CFE, qui devaient être supprimées en 2024 sont maintenues. « La CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises) est maintenue jusqu’en 2026 et diminuée progressivement pour être supprimée, sauf changement, en 2027 », souligne Stéphane Weibel. Concernant la CFE (cotisation foncière des entreprises), son taux cible est reporté à 2027 (1,25%), en suivant une baisse progressive (1,531% au titre de 2024, 1,438% au titre de 2025, 1,344% aux titre de 2026).

Loi relative au partage de la valeur

La Loi du 29 novembre 2023 relative au partage de la valeur prévoit un aménagement de la Prime de Partage de la Valeur (PPV). Pour rappel, la prime de Partage de la Valeur, qui a remplacé la prime PEPA à l’été 2022, peut être versée quelle que soit la taille de l’entreprise, à tous les salariés ou à ceux dont la rémunération ne dépasse pas un plafond. Elle est exonérée de cotisations sociales dans la limite de 3 000 euros par an et par bénéficiaire (6 000 euros sous conditions). Elle est exonérée de CSG/RDS et d’IR à titre temporaire (jusqu’au 31/12/23) si la rémunération du salarié est inférieure à 3 SMIC.

Les aménagements de la LF 2024 prévoient de verser deux PPV par an sans changement de plafond global et de proroger pour trois ans (2024-2026) le régime renforcé sous conditions. Un nouveau PPVE (Plan de Partage de la Valorisation des Entreprises). Le dispositif expérimental (2023-2028) concerne les entreprises de 11 à 49 salariés réalisant un bénéfice net fiscal au moins égal à 1 % du chiffre d’affaires pendant trois exercices consécutifs.

Les entreprises auront alors quatre options :

  • abonder un plan d’épargne existant ;
  • mettre en place un dispositif de participation ou d’intéressement ;
  • verser une PPV ;
  • mettre en place le dispositif expérimentale de participation.

TVA

Facturation électronique

La facturation électronique devient peu à peu la norme, avec un quadruple objectif de la part du législateur : « diminuer le coût de la facturation pour les entreprises, simplifier les procédures, lutter contre la fraude et disposer d’un outil de mesure de l’activité des entreprises en temps réel », souligne Stéphane Weibel. « Il faut savoir qu’aujourd’hui, une facture coûte 25 euros : 16 euros pour l’acheteur et 9 euros pour le vendeur ». à compter du 1er septembre 2026 (et non plus du 1er juillet 2024 comme prévu initialement), la réception, l’émission et la transmission des factures devra se faire progressivement de manière dématérialisée, pour les plus grandes entreprises et les ETI d’abord, puis pour les PME et micro-entreprises.

Report du taux réduit pour travaux de rénovation énergétique

« L’application du taux réduit de 5,5% de TVA sur les travaux de rénovation énergétique prévue au 1er janvier 2024 entrera en vigueur à compter de la publication d’un arrêté et au plus tard au 1er octobre 2024 », note Me David Mennetret. Il concernera les travaux d’isolation thermique, de chauffage, de ventilation et de production d’eau chaude sanitaire.

Contrôle fiscal et lutte contre la fraude

Parmi les nouvelles mesures, on retiendra particulièrement le renforcement des droits d’enquête sur internet et sur les réseaux sociaux. Un agent des impôts peut en effet désormais mener une enquête de manière anonyme. Dans ce cadre il pourra prendre connaissance de toute information publiquement accessible sur les plateformes ou interfaces en lignes, y compris lorsque cela requiert la création d’un compte (sites internet, réseaux sociaux, applications de messagerie).

Il est également autorisé à participer à des échanges électroniques, à extraire et conserver les données sur les personnes susceptibles d’être les auteurs des manquements.

L’enquête doit cependant porter sur certaines infractions :

  • Activité occulte ;
  • Construction ou aménagement sans autorisation ;
  • Insuffisances de déclaration liées à un abus de droit ou des manœuvres frauduleuses ;
  • Défaut de déclaration des comptes ou assurances vies détenues à l’étranger ;
  • Disposition de sommes d’argent issues d’activités illicites.

Fiscalité concernant les particuliers

Impôt sur le Revenu (IR)

La LF 2024 prévoit l’actualisation des tranches du barème de l’IR en relevant les seuils de + 4,80 %.

Réductions et crédits d’impôts : Parmi les nouveautés, on note la création d’une réduction d’impôt de 66 % pour les dons aux organismes concourant à l’égalité entre les femmes et les hommes ainsi que la création de réductions d’impôts pour les souscriptions en numéraire au capital des jeunes entreprises universitaires (JEU) ou des jeunes entreprises innovantes (JEI).

Le crédit d’impôt pour les dépenses permettant l’adaptation des logements à la perte d’autonomie ou au handicap est prorogé de deux ans.

Revenus fonciers

La réduction d’impôt “Malraux” pour les dépenses payées jusqu’au 31 décembre 2024 concernant les immeubles situés dans des quartiers anciens dégradés est prorogée, tout comme la réduction d’impôt “Denormandie ancien” jusqu’au 31 décembre 2026 et alignement des taux de réduction d’impôt.

Plus-value immobilière

L’exonération de l’impôt sur la plus-value immobilière en cas de cession d’immeuble destiné au logement social est prorogée jusqu’au 31 décembre 2025. L’abattement exceptionnel “loi Elan” est quant à lui prorogé de deux ans et son champ d’application est étendu.

Impôt sur la fortune immobilière

Alignement de l’imposition à l’IFI que les biens immobiliers soient détenus en direct ou via une société : exclusion des dettes contractées directement ou indirectement par un organisme ou une société qui ne sont pas afférentes à un actif imposable. « L’objectif de la Loi de Finances 2024 est de rétablir un équilibre entre ceux qui détiennent les biens en direct et ceux qui détiennent les actifs immobiliers », souligne Virginie Villemain.

Impôts locaux

La LF 2024 prévoit deux mesure phares : En premier lieu, la consécration de l’exonération de la taxe foncière pendant 15 ans sur les logements sociaux ayant fait l’objet de travaux de rénovation lourde. Cette exonération est portée à 25 ans lorsque la demande d’agrément a été déposée entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2026.

Elle prévoit également un assouplissement des règles de fixation du taux de taxe d’habitation sur les résidences secondaires : Ainsi lorsque leur taux de la THRS sera inférieur à 75 % du taux moyen constaté l’année précédente dans l’ensemble des communes du département, les communes pourront prévoir une majoration du taux de cette taxe, sans que l’augmentation soit supérieure à 5 % de cette moyenne.