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L’abattoir de Rethel mise sur le circuit court

Dossier circuits courts. Deux ans après sa reprise par Prestaba, l’abattoir de Rethel (Ardennes) mise plus que jamais sur le circuit court. Son président, Thierry Vroman, explique son fonctionnement ainsi que les investissements réalisés pour baisser ses dépenses énergétiques.

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Photo de Thierry Vroman
Thierry Vroman, Président de Prestaba insiste sur l’importance de « la qualité, la traçabilité et la proximité ». (Crédit : ND)

Ils sont de moins en moins. Près d’un abattoir sur cinq en France serait « en situation difficile », selon le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire. En cause, une baisse des volumes des élevages. Repris il y a deux ans à la barre du Tribunal de Commerce de Sedan, à 50% par les Bergers du Nord-Est et 50% par la Socavi (Société carolomacérienne des viandes), l’abattoir de Rethel effectue aujourd’hui un chiffre d’affaires d’1,8 million d’euros. Le foncier des abattoirs appartient à la Communauté de Communes du Pays rethélois, la location et l’exploitation sont effectuées par Prestaba.

« Nous effectuons uniquement de la prestation de services : abattage, découpe, fabrication de steak et transformation », détaille Thierry Vroman, Président de Prestaba. « Notre mission est d’être à la disposition de la filière élevage », précise celui qui est aussi Président des Bergers du Nord-Est, regroupant 320 producteurs sur quatre régions (Nord Pas-de-Calais ; Picardie ; Champagne-Ardenne ; Lorraine) et 10 départements allant de la Somme à la Meuse. Chaque année, ce sont environ 2 000 bovins et 35 000 bovins qui sont abattus par la coopérative.

« La coopérative fait abattre ses agneaux à Rethel pour ensuite les commercialiser auprès des grossistes, boucheries et GMS. » Pour les bovins, Prestaba fournit des prestations pour des éleveurs provenant de la Marne, des Ardennes et de l’Aisne.

« Toutes les bêtes proviennent d’un rayon de 100 km. » Une nécessité pour les éleveurs locaux qui, s’ils doivent faire de très nombreux kilomètres pour abattre leurs bêtes, finissent pour certains par ne plus s’y retrouver. Les bovins sont ici achetés soit par des grossistes aux éleveurs, soit par des bouchers.

« Nous livrons les carcasses chez eux en gérant le transport froid. » Les éleveurs amènent aussi eux-mêmes leurs bêtes pour l’abattage et la transformation « nous assurons toute la découpe qui, pour un animal de 500 kg, prend une demi-journée » puis repartent « quatre à six jours plus tard pour laisser à la viande le temps de se détendre » avec les découpes qui seront ensuite vendus en direct à la ferme. « Nous répondons au plus près aux exigences du circuit-court puisque nous fonctionnons sans intermédiaire et dans un périmètre très resserré », argumente Thierry Vroman.

La distance a ici toute son importance car c’est lors des déplacements entre l’élevage et l’abattoir que l’animal est soumis à un grand stress. « Le bien-être animal commence chez l’éleveur et se poursuit pendant le transport. Le stress n’est pas bon pour l’animal, ni pour la qualité de la viande ensuite. » C’est pourquoi, dès leur arrivée sur le site, les animaux sont placés dans la bouverie avec de la paille jusqu’à leur passage auprès d’un opérateur qui les étourdit instantanément à l’aide d’un « matador », sorte de pistolet percuteur haute pression qui perfore le crâne de l’animal à 180 km/h… Concernant le bien-être animal, Thierry Vroman insiste : « Tout est extrêmement contrôlé par les services de l’État ainsi que par les services vétérinaires. Ensuite, c’est important de savoir ce que l’on a dans l’assiette et comment cela y arrive, sans déni. Il y a une éducation à l’alimentation à faire », estime celui qui n’hésite pas à ouvrir les portes de l’abattoir aux élèves en BTS agricole.

Économies d’énergie

Pour que l’abattoir fonctionne correctement, 20 salariés sont employés aux 35 heures à des postes aussi variés que le respect des conditions très strictes d’hygiène, la qualité, l’abattage mais aussi la boucherie et la préparation des carcasses, avec autant de gestes très techniques. Le transport aussi est assuré par Prestaba. Tous ces postes ainsi que le fonctionnement intrinsèque de l’abattoir impliquent de fortes dépenses énergétiques.

Et devant les fortes hausses de coût, de l’ordre de 90 000 euros pour la coopérative en 2023, Prestaba a investi l’année dernière dans un compresseur à production variable (qui sert à produire l’air comprimé pour tous les outillages). « En deux ans, l’investissement est amorti. » Eau chaude, gaz, électricité, les dépenses en énergie se sont en effet chiffrées en 2023 à 280 000 euros pour l’abattoir. « Notre équilibre financier repose sur le volume et sur les dépenses dues aux charges fixes. Notre stratégie ne varie pas : elle est au service des éleveurs pour faire de la viande de qualité. »